La bande du 9 : La communaut du 9ème art

Après le très remarqué "Mezkal", le duo de choc Kevan Stevens et Jef, revient en force pour nous livrer un album singulier à la manière d'un fury road dans un pays en proie au chaos. Un roman graphique en one-shot sur un rythme endiablé où répliques cinglantes et hémoglobines sont au rendez-vous. Un gros coup de cœur.
 

Nous sommes en 2074, la France est en proie au chaos suite à l'ingérence de la population face au réchauffement climatique aux guerres nucléaires et à la succession de virus tous plus mortels les uns que les autres.
Nous suivons Alex, une femme forte, une guerrière qui n'a aucun problème pour se défendre toute seule. Adepte des arts martiaux et sortant tout juste d'un stage de krav-maga. Ne vous fiez pas aux apparences, c'est une véritable furie. Avec son collègue Jean-Pascal De Parnicieux dit "Fonzy" et son pingouin domestique, elle a été sollicitée par le parrain de la mafia local : "Nicolas", à la tête de la péninsula corp. Leur business est des plus lucratifs, ils font dans la distribution d'antibiotique au marché noir à une époque où les médicaments se font rares. Elle a pour mission de conduire un convoi chargé de 15 tonnes de marchandises allant du Havre à Marseille. Une mission périlleuse voire suicidaire car elle et ses acolytes devront traverser le territoire de l'armée du seigneur en passant par des routes peu sécures truffés de mines anti-personnel et de pièges en tous genres. Parviendront-ils à arriver à bon port sans essuyer trop de dommages collatéraux ?
Kevan Stevens et Jef nous propulsent dans un univers déstructuré où règne la violence brute et où des notions tel que l'amour, la famille ... On été relégués au passé. Une histoire violente flirtant avec le récit d'anticipation, nourrie par de sublimes références aux années 80. Ils surfent sur un rythme débridé avec les problématiques actuelles (déforestation, surconsommation, pollution, ...) ici, la violence est au détour de chaque planche enchaînant explosions, sexes et hémoglobines. Les références s'enchaînent à toute vitesse et les dialogues caustiques abordent quantité de sujets polémiques, propres à notre époque. (écriture inclusive, transgenre, destruction de la famille aux profits de sexualité débridé et assumée...)
À la manière d'une satyre contemporaine, les auteurs rendent hommage à une époque révolue et ô combien regretté. Ça fourmille de clin d'œil allant des frères Bogdanov (qui ici sont 3) à l'automobile française (205, 2 CV, 4 L ...) en passant par Goldorak et Dragon Ball. Sur un ton cynique et déluré, cet ouragan de références que l'on se prend en pleine face s'accorde efficacement avec le dessin au trait fin et à la colorisation légère de Jef. Ce dernier nous offre un casting des plus réussi mêlant gueule cassée et sublime corps aux formes rebondies et généreuses. On constate d'emblée que le duo d'auteurs a pris un grand plaisir à la création de cet ouvrage et de son univers. Ils nous offrent un panel de personnages singuliers auxquels on a tout juste le temps de s'attacher vu à la vitesse où ils disparaissent.

Un album qui parlera surtout aux personnes qui ont traversé les années 70 et 80 au vu des références à la culture pop de cette époque. Une BD violente à souhait, haute en couleurs, nous offrant un pur moment de plaisir. Un one-shot des plus singuliers qui va probablement provoquer une scission dans le lectorat. Car ici pas de demi-mesure, on aime ou on déteste. Pour ma part, j'adore. Un véritable coup de cœur qui chamboule les codes de la BD franco-belge.