La bande du 9 : La communaut du 9ème art

En arrière campagne, les nouvelles du front et les décès sont annoncés par le facteur. Entre temps, les femmes s’occupent des moissons et de la ferme, les hommes restés, car trop vieux ou inaptes, sont là pour apporter de l’expérience ou bien faire régner leurs pouvoirs malsains. C’est la vraie vie de l’arrière-pays et ses règles rurales.
 
 
En Auvergne, au Puy Violent en Août 1914, Le jeune Joseph assiste au départ de son père sans bien comprendre pourquoi l’armée a besoin de lui. Il comprend juste qu’il reste seul à la ferme accompagné de sa mère et de sa grand-mère et que c’est maintenant lui l’homme de la famille. Les femmes quant à elles savent très bien qu’elles vont devoir s’organiser notamment pour les moissons. Elles pourront toujours compter sur le vieux Léonard et Joseph sait qu’il pourra toujours se confier à lui. Le soir venu, Joseph aime venir se réfugier dans sa cave qui lui sert de refuge et dans laquelle il sculpte dans la glaise des animaux en pensant à son père. Ainsi va la vie de Joseph, jusqu’au jour où débarquent au village une dame élégante et sa fille Anna. Elles semblent un peu perdues et cherchent la ferme des Valette, la ferme du beau-frère de la dame, qui va les accueillir pendant que son mari est parti lui aussi au front. Joseph et Anna vont vite faire connaissance et se rapprocher, la petite vie tranquille du village ne va pas le rester longtemps.
 
 
Adapté d’un roman de Franck Bouysse, l’adaptation graphique nous projette directement dans le monde rural auvergnat juste au début de la guerre. Dès les premières planches, l’atmosphère oppressante, sombre, voire malaisante s’installe. Les personnages sont bien campés et respectent les modes de vie de l’époque, à l’image de l’impressionnant Valette, même si un siècle plus tard certains actes semblent inappropriés.
L’histoire débute sans grande énergie, positionnant les répercussions de la mobilisation des hommes pour le front, laissant les femmes seules pour gérer les exploitations agricoles et les estropiés sur la touche, à l’image de Valette, qui en conséquence va faire rejaillir toute sa frustration sur sa femme, sa belle-sœur et la jeune Anna.

Cet ouvrage est une belle critique sociale de ce monde rural, rustre, limite violent où les choix du bon sens prennent le pas sur les choix de la raison ou du cœur. Cette société qui semble être le Moyen Age est pourtant toute proche de nous, voire sûrement encore présente dans certains petits villages éloignés. L’originalité est que l’histoire se déroule pendant la première guerre mondiale, mais celle-ci ne fait écho que par le facteur qui vient ramener les lettres du malheur. Outre cela cette guerre est peu présente, montrant ainsi l’écart avec notre société actuelle et la rapidité de diffusion de l’information.
C’est le dessinateur Loïc Godart qui a mis cette adaptation en visuel, avec un style à la fois réaliste et caricatural, très détaillé et ressemblant à un style graphique souvent utilisé par les auteurs espagnols, le tout accompagné de couleurs sombres, ocres. Un style de dessin parfaitement adapté à l’histoire, un style que j’ai fortement apprécié.
Un retour à la terre, un bond dans le temps permettant de réaliser qu’avant la vie c’était ça.

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