La bande du 9 : La communaut du 9ème art

Déportées de force vers l’île de la tortue, trois jeunes femmes vont lier leurs destins, leurs amitiés pour affronter la cruauté de ce monde bourré de testostérone. Les auteurs ont pris le parti de confier le premier rôle à ces femmes pour trois tomes dont le premier tient ses promesses.
 

1642. Un navire vogue vers les caraïbes pour rejoindre les colonies. A son bord, une majorité de femmes. Mais elles ne sont pas là pour faire du tourisme, elles ont été extraites de leurs prisons et embarquées de force. Ces filles, dont le passé de voleuses ou prostituées font d’elles des femmes de mauvaise vie, ont une chance de se racheter. L’île de la tortue a été reprise aux Anglais par le gouverneur Levasseur et ce dernier souhaite sédentariser sa population. Son objectif est d’utiliser ces femmes pour les transformer en parfaites épouses à destination des flibustiers et autres colons qui logent sur l’île et qui les attendent avec impatience.
 

A bord du navire, la joie n’est pas la même, les tensions et les bagarres sont monnaie courante entre les filles aux caractères bien trempés, sans compter sur les nombreuses tempêtes qui secouent l’embarcation. C’est d’ailleurs grâce à l’une d’elles que Quitt, Louise et Appoline vont faire connaissance et lier une amitié certaine. Ensemble, elles vont débarquer sur l’île de la tortue pour être vendues comme de vulgaires esclaves à de parfaits inconnus. Partagées entre colons riches, boucaniers ou autres durs à cuire, les femmes vont vivre des destins différents sur cette île de la tortue.
 
 
Si je vous dis : Pirate, Caraïbes, conquêtes, je suis prêt à parier que les premières images qui vous viennent seront celles d’un corsaire arborant sur ses habits une tête de mort, couteau entre les dents prêt à bondir sur un autre navire sous un soleil de plomb. Et bien ici, vous auriez tout faux car même si nous sommes dans le même contexte, les cartes sont totalement différentes. Le scénariste Stéphane Piatzszek (qui se trouve être notamment l’auteur de « la Cour des miracles », « une famille en guerre » et « Kilomètre Zéro » dernièrement sorti chez Grand Angle) est parti sur une autre vision, celle de mettre en lumière les femmes et leurs rôles durant cette période. Pour le moment, nos trois héroïnes n’ont pas encore la notoriété d’une Ching Shih ou d’Anne Bonny mais le récit laisse entrevoir qu’elles ne vont pas se laisser faire. Quitt, Louise et Appoline subissent le monde dans lequel elles viennent de débarquer, l’homme a tous les droits dont celui de gérer la vie de sa femme. Rassurons nous, nous ne sommes que dans le premier tome, qui est surtout un tome de présentation, de plantage de décor avec une belle lueur qui permet d’entrevoir que l’on risque fort de s’attacher au destin de ces trois filles, à leurs amitiés et à leur esprit d’action.
 

Côté graphisme, Tieko (Tomoe chez Grand Angle) remplit sa part de marché, sans être l’album de l’année. L’essentiel est là mais compte tenu de la situation historique et de celle des jeunes filles, on s’attendait à un peu plus de dynamisme dans les cadrages et les mouvements des personnages trop statiques à mon goût. Cependant on retrouve à travers cet album un sentiment de nostalgie avec ces bonnes vieilles BD d’antan où n’existaient pas tous ces artifices techniques au niveau de la couleur ou des traits de crayon qui viennent un peu fausser la lecture graphique que l’on peut avoir d’un album.
Au-delà de cet aspect, l’histoire est prenante, le suspense est bien planté et l’on se demande bien comment ces trois jeunes filles vont évoluer dans ce monde plus que machiste.

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