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La bande du 9 : La communaut du 9ème art

Bandeau de l'article La révolte des terres

La révolte des terres

Scénario : Koza
Dessin : Marion Mousse
Editions : Casterman
 
 
Ferdinand est un jeune français comme il en existe tant. Mineur, il ne sent pas très concerné par la grève générale. Mais en 1941, on ne peut plus faire comme si de rien n’était.
Koza et Marion Mousse nous dressent le portrait d’un français moyen confronté à la barbarie des hommes. Un album qui fait d’ores et déjà figure de référence.
 
Juin 1945. Une jeune femme entre au Lutetia, à Paris. Elle regarde les photos sur les murs. Elle montre une photo aux gens. Elle recherche quelqu’un. Le Lutetia est, en effet, le lieu de passage obligé de tous les réfugiés français et Odette, c’est son nom, recherche son frère, Ferdinand. Cela fait quatre ans que le jeune homme a été déporté et sa famille n’a que de très rares nouvelles. Ferdinand était mineur à Montigny-en-Gohelle, dans le Nord. En ce mois de mai 1941, il ne se sent pas très concerné par les mouvements de grève. Odette, elle, s’engage fortement, aux côtés de Gilles, son fiancé. Malheureusement, un soir, la jeune femme se fait arrêter en train de tracter. Si elle est rapidement libérée, les SS organisent aussi rapidement une rafle. Une demi-douzaine d’hommes sont arrêtés parmi eux Ferdinand et les meneurs de la grève. Pour ces derniers, cela ne fait aucun doute c’est Ferdinand qui les a balancés. Commence alors pour le jeune homme une difficile descente aux enfers : d’un cote, le camp de concentration de Sachsenhausen, la haine des siens de l’autre. Et si l’humanité se trouvait côté allemand ?
 
En France, on a une vision assez manichéenne de la Seconde Guerre mondiale et de l’Occupation : soit on collaborait, soit on résistait et certains actes de résistance ont été un peu oubliés. C’est le cas des grèves de 1941, dans les houillères du Nord-Pas-de-Calais. En écho aux grèves belges, les mineurs français réclament de meilleures conditions de travail. Conscients de la dangerosité de l’occupant, certains privilégient la pêche aux manifestations. C’est le cas de Ferdinand ! Pour les nazis, ces grèves sont des actes de résistance communistes. Ils décident donc de faire un exemple avec une vaste rafle. Pour Ferdinand, c’est la double peine : prisonnier à Sachsenhausen et détester des siens qui voit en lui un traitre. Seul un prisonnier va faire preuve d’humanité avec lui, et cet homme est allemand.
Koza, alias Maximilien Le Roy, s’attarde ce qui est considéré comme le premier acte de résistance collective en France. La scénariste dresse le portrait d’un homme comme tous les autres. Il ne collabore pas, il ne résiste pas. Il va cependant être pris dans le tourbillon de l’Histoire. Le lecteur découvre donc l’histoire de Ferdinand par une série de flashbacks. L’ensemble  est d’une grande qualité historique, n’hésitant pas à montrer toute l’entendue de la barbarie nazie.  Barbarie magistralement mise en image par Marion Mousse. Le choix du cadrage, la justesse des ellipses comme des flashbacks montrent avec un grand réalisme les conditions inhumaines dans les camps de concentration. En même temps qu’il découvre une certaine entraide, une humanité dans cet univers inhumain, le lecteur visualise aussi les conditions de vie et de travail des mineurs sous l’Occupation.
 
Cette Révolte des terres est à ranger dans le rayon des grandes œuvres sur la Seconde Guerre mondiale entre Si c’est un homme de Primo Levi  et Maus d’Art Spiegelman. L’album démontre bien toute la complexité de la période. Il ne cherche ni minimiser la barbarie nazie  ni à omettre l’humanité des hommes. Non, vraiment un très grand album !


Cédric
Chroniqueur
La Bande Du 9


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