La bande du 9 : La communaut du 9ème art

François Durpaire (scénario) , Brice Bingono (dessin) et Scarlett (couleurs) nous proposent une plongée en pleine dystopie sombre et totalitaire. Avec "Le dernier livre" ils nous narrent à la manière de Fahrenheit 451, l'histoire d'une société dans laquelle les livres sont proscrits, et où les individus qui outrepassent la loi sont traqués et incarcérés. Un thriller sombre et glaçant nous rappelant l'importance des livres.
 

En 2032 suite à la propagation d'un virus extrêmement dangereux et mutagène, la population tente de lutter.
Dans ce contexte de pandémie mondiale, le fondateur de fatalbook, Monsieur Z devient président et prend la tête des USA. Son entrée à la Maison Blanche signe la consécration des géants du numérique et leur désormais toute puissance. À ce moment, les dirigeants du monde et les leaders du Net s’entendent sur un projet capable selon eux d'endiguer la progression de l'épidémie : dorénavant, le port d’un masque connecté sera rendu obligatoire. Ce dernier permet à la fois d’être protégé de ce virus mortel et également d’être en contact permanent avec les informations numérisées disponible sur le web. Ils décident alors de proscrire les livres !
Les livres papier doivent disparaître ! Certains seront numérisés, les autres considérés comme plus subversif ou allant à l'encontre de la morale établie seront tout bonnement détruit. En 2040, dans le monde entier, lire ou posséder un livre est devenu un crime passible de sanction. Les forces de l’ordre interviennent dès qu’un drone en repère un… Et la police n'hésite pas à faire usage de la force sans aucune sommation. Dans cette société où l'humanité est littéralement aliéné, rendu esclave des marchands du numérique, un mystère éclot : Depuis quelque temps, des enfants disparaissent mystérieusement, sans laisser de traces. C'est d'ailleurs le cas de Héliade, la fille de notre héros, qui va vivre des moments difficiles. Lancé sur sa trace, il va rapidement la retrouver au sein d'une communauté souterraine visant à faire perdurer les vieilles traditions écrites et réapprendre à ses enfants des notions primaires et essentielles telles que l'écriture et la lecture.
À la manière de Fahrenheit 451, Francois Durpaire nous décrit un monde où la population est composée uniquement de personnes aliénées totalement dépendantes de leurs possessions matérielles et n'ayant par conséquent aucune réflexion sur le monde qui les entoure. Il nous plonge dans un avenir totalitaire ou désormais, tout est numérisé, les bibliothèques sont fermées ainsi que les écoles, un monde ou règne la désolation et la délation. Une réalité carrément flippante, pouvant facilement faire écho à la nôtre. Sur fond de thriller, "Le dernier livre " fait surtout l'apologie du support papier, de l'écriture et offre, en parallèle de son enquête, une réflexion sur l’histoire du livre. En effet, l'auteur retrace l’histoire de l’écriture et cette tendance de la part de certains dirigeants, quelle que soit l’époque, quelle que soit la religion, de vouloir faire disparaître les ouvrages qui peuvent gêner l’établissement d’une nouvelle doctrine. Soutenu par les ambiances sombres et soignées de Brice Bingono, François Durpaire construit un ouvrage pertinent qui pousse à s’interroger sur le rôle essentiel de la littérature dans la construction de l’humanité. Les visuels que nous offre Brice Bingono sont vraiment superbes, réalistes, et magnifiquement mis en couleur par Scarlett apportant une véritable plus-value au récit.
Ce thriller d’anticipation réaliste pousse le lecteur à une réflexion importante sur la liberté d'expression, les dérives autoritaires de notre société, l'endoctrinement (télévisuel notamment) et le conformisme. Malheureusement, le ratio thriller et leçon d'histoire, me semble mal équilibré laissant un sentiment de pas assez.