La bande du 9 : La communaut du 9ème art

L’histoire du Laos ne peut se comprendre qu’à travers celle des laotiens. Jean Luc Cornette et Vanyda nous propose donc de feuilleter l’album de famille de la dessinatrice afin de retracer la vie de son père et de son pays d’origine.
Un récit particulièrement émouvant !

Dans la jungle laotienne, le tigre est de retour. Animal féroce, il n’en est pas moins respecté par les habitants des villages. Pour le vaincre, Souradeth, jeune père de famille, compte autant sur  ses pièges que sur ses prières. Si ses oraisons vont protéger son corps des pièges, ces derniers vont tout de même mortellement le blesser. Il charge alors son fils, Virasay, de trouver la bonne formule auprès des bonzes.

Quelques années plus tard, en 1943, Virasay s’engage chez les chasseurs laotiens. Musicien, il fait la rencontre de Phongsali. Ils se marient et leur premier enfant répond au prénom de Soulivanh.
Tout semble calme dans cette « Suisse de l’Asie ». Mais l’orage gronde déjà. Sous l’impulsion du Viet Minh voisin, le Laos est déstabilisé. Les français demandent le soutien des tribus francophiles afin de conserver la colonie. C’est dans ces conditions que Virasong se lie d’amitié avec Ly Xia, un Hmong qui rêve de devenir taxi.
Mais la vie est ainsi faite que les guerres qui secouent le Viet Nam voisin finissent par frapper le Laos. Et avec les guerres suit le cortège de massacre et d’épuration. Par chance, les proches de Virasay sont partis étudier en France : Boum, son neveu, fervent communiste, étudié à Montpellier et Soulivanh intègre Saint Cyr. Quand au pays, il sombre peu à peu dans l’horreur et le chaos jusqu’à ce que, tel un phœnix, il renaisse de ses cendres.
 
Tout commence par une planche d’éléphants en train de s’abreuver à la rivière. Dès cette première page, on sait que le dépaysement va être total. On plonge dans le Laos du début du siècle précédent. On découvre les us et coutumes de ce petit pays qui faisait partie de l’Indochine française. On fait la connaissance de Soulivanh dont on déroule l’histoire tout au long de l’album. En réalité, Soulivanh est l’avatar de Thong Lith Phongsavath, qui se nomme officiellement aujourd’hui François Savetier et dont la fille n’est autre que Vanyda, la dessinatrice de l’album. C’est donc un récit fortement biographique que nous propose Jean Luc Cornette. Mais cette histoire ne pouvait être isolée. Il fallait qu’elle soit mêlée à l’histoire du pays afin que le lecteur français comprenne la destinée des uns et des autres. Pour se faire, les auteurs ont pris l’avion et sont partis plusieurs semaines  à la rencontre des témoins, de la petite comme de la grande histoire. Vous l’aurez compris, l’album est à double lecture. A la géopolitique répond la vie quotidienne des laotiens. Cette dernière est particulièrement bouleversante et nous renvoi à notre époque. En ce qui me concerne, j’ai été terriblement ému par ce commandant de bord qui offre une tournée générale à ses passagers, tous réfugiés sans le sou.
Mais un album de BD c’est aussi un dessin. Et ici aussi, l’album fait mouche. Le trait est élégant et renforce ainsi l’émotion. Le seul bémol serait la multiplicité des ellipses qui font vieillir les personnages et déstabilisent quelque peu le lecteur.

Au final, un très bel album qui nous livre l’histoire d’un pays et d’un peuple lié au notre mais trop souvent oublié de nos manuels d’histoire. Une grande et belle histoire brillamment émouvante.

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