La bande du 9 : La communaut du 9ème art

Avec Mezkal, on peut dire que Kevan Stevens signe un premier scénario BD des plus réussi. Il frappe fort et entre par la grande porte dans le monde de la bande dessinée, avec ce road-movie psychédélique en mode drogue sexe et rock'n roll. Rien n'est laissé au hasard et le choix graphique de Jef, offrant un panel de personnages atypiques, très expressifs teintés de couleurs pop et lumineuses fait mouche. Une histoire des plus singulière, forte et poignante, un récit habité dur et violent qui ne porte pas le nom d'une boisson hallucinogène pour rien. Une BD extraordinaire à ne mettre qu'entre les mains d'un public averti.
 

Vananka a beau se creuser la tête, du plus loin qu'il se souvienne, la dernière fois qu'il a réellement ressenti le bonheur, le ramène loin dans le passé. À une époque révolue, alors qu'il n'avait encore que 5 ans, juste avant que son père ne les quitte sa mère et lui. Depuis, il a bien grandi, mais vit toujours auprès de sa maternel devenu alcoolique. Il est rongé par le passé, ses regrets et toujours, ce même vieux cauchemar qui revient irrémédiablement. Alors qu'il vient de se faire gentiment congédié de son boulot, il découvre sa mère décède dans son plumard, une boite de Médoc à son coté et une bouteille d'alcool à la main. À ce moment de sa vie devenue orphelin, et par la même occasion criblé de dettes, il sait qu'il n'a plus rien à perdre et que le rêve américain lui a tourner le dos depuis longtemps. Alors, il décide avec pour seul compagnon sa fidèle guitare de partir à l'aventure, sur les traces d'un père, vers le Mexique. Une route semée d'embûches, un périple qui va très vite se transformer en quête initiatique dans laquelle il découvrira l'amour, la violence des cartels, la déception et bien plus encore. Toute une série de péripéties qui le feront bientôt renaître, apaisé, rempli de conviction nouvelle. Il pourra alors porter un tout nouveau regard sur sa vie et peut être accomplir sa mission. Mais je ne vous en dirais pas plus afin de ne pas spoiler, et ainsi gâcher le plaisir et la surprise à la lecture de cette histoire des moins banales.

Ici, Kevan Steven scénariste pour le cinéma et script doctor, signe sa première bande dessinée et on peut dire qu'il ne fait pas semblant. En effet, avec un peu plus de 170 planches, Mezkal est une œuvre tout aussi hallucinante que son titre pouvait nous le faire prédire. Il nous conduit dans une quête initiatique, envoyant un jeune Américain sur les traces de son âme, de son passé et de son devenir. Le tout dans un rythme endiablé ne nous laissant que peu de répit pour souffler. Nous sommes littéralement happées, embarquées à la manière d'un fury road, ne voulant rien concéder avant l'arrivé. Du pur bonheur psychédélique et jubilatoire. Devant une telle créativité scénaristique, il se fallait un style graphique des plus débridés afin d'être à la hauteur de nos attentes et c'est chose faite. Le dessin de Jef est tout simplement bluffant, comme si le scénario avait été écrit pour lui. Il manie les scènes et les changements de plan et de perspective à la perfection nous offrant des décors bluffant et véritablement immersif. Son dessin fouillé et grouillant délibérément de détails et de couleurs pop, ne peux que rappeler une influence de grand noms tel que Moebius et darrow. Ses personnages haut en couleurs à mi-chemin entre réalisme et caricature son expressif et attachant. Ici, le dessinateur se surpasse, il joue avec les codes cinématographiques et parvient à sublimer par son trait l’action exaltée de cet ouvrage.

Vous l'aurez compris, ces deux auteurs talentueux proposent une œuvre atypique singulière, digne des plus grands films hollywoodiens. Un road-movie à l'action débridé, hyper violent et offrant diffèrent degrés de lecture. Un récit à lire sans tarder, qui vous laissera sans nul doute une forte impression.