Nom de la série : Carcoma
Scénario : Andrés Garrido
Dessin : Andrés Garrido
Couleur : Andrés Garrido
Maison d'édition : Dupuis
L’équipage du Carmona est désenchanté : tous les matelots voguent en attendant leur mort plus ou moins proche. Pourtant, lors d’un échouage, ils recueillent une étrange créature marine qui va totalement les transformer. Mais cela n’est pas du gout du capitaine. Pour sa première création, Andrés Garrido signe un conte macabre et poétique sur fond de récits de pirates. Pour un coup d’essai, c’est un coup de maitre.
Dehors, la mer gronde. C’est pourtant une considération bien plus humaine qui réveille Sépia : une montée de lait ! Maintenant qu’elle est réveillée, elle est intriguée par le bruit qui règne sur le pont supérieur. L’équipage pleure Tique, emporté par la fièvre durant la nuit. Son frère, Puce, refuse de livrer son corps à la mer. C’est alors qu’apparaît le capitaine. Implacable, il ordonne et les matelots s’exécutent. Il leur fait également réciter leur serment : ne plus jamais poser le pied sur la terre ferme, voguer inlassablement vers l’inconnu en attendant une mort certaine. Alors que Sépia est à la vigie, elle s'endort, ivre morte. Elle ne voit donc pas l'île sur lequel le Carmona vient s’échouer ! Pas le choix, les pieds, dans l’eau, touchent tout de même le sol. C’est alors que l’équipage découvre une étrange créature marine. Adoptée par Sépia, elle va grandir et s’épanouir avec les membres de l’équipage. Tout doucement, elle va transformer chacun des membres, elle va apaiser leurs maux, elle va apporter de la joie. Mais tout cela n’est pas du goût du capitaine qui, bientôt, va faire régner la terreur sur son bateau et son équipage.
Pour sa première création en BD, Andrés Garrido nous présente une histoire de pirates comme on croise peu. Fort naturellement, l’album s’ouvre sur une scène de tempête. Sépia, l’héroïne se réveille en sursaut, sa poitrine pleure ! Si on comprend rapidement qu’il s’agit d’une montée de lait, on reste dans l’expectative sur le pourquoi. Il en est de même pour tout l’équipage. S’il est très hétéroclite, on saisit le point commun grâce au serment que fait inlassablement répéter le capitaine. Tous ont laissé quelque chose ou quelqu’un à terre, tous ont fui leur passé et tous pensent mourir sur le Carmona. Cette phase d’exposition s’interrompt lorsque le bateau s’échoue alors que Sépia était de vigie. Sans en avertir leur capitaine, l’équipage pose pied à terre. C’est alors qu’ils font la rencontre avec une drôle de créature marine. Le huis-clos va alors se transformer. Chaque marin va reprendre confiance en lui et s’ouvrir sur les autres. C’est également à ce moment-là que l’intrigue bascule dans le fantastique car le capitaine va lui aussi évoluer. Pour mettre en image, ces touchantes histoire individuelles, Andrés Garrido opte pour un style brut. Lui qu’on avait un découvert très coloré grâce à Love Love Love, sur un scénario de Kid Toussaint, fait le choix d’ambiances très ternes. Les personnages, tout comme leurs émotions, sont caricaturés à l’extrême, contrastant avec la poésie de certaines scènes. Notons au passage que ces dernières font souvent l’objet d’un traitement particulier puisque étant sur des pleines pages. Pour finir, n’oublions pas que du rêve au cauchemar, il n’y a parfois qu’un pas qu’Andrés Garrido franchit avec ses lecteurs.
Pour sa première création en solo, Andrés Garrido signe donc un conte macabre et poétique sur fond de récit de pirates désabusés qui ravira tous les amateurs du genre.