Nom de la série : Deryn Du
                                                                                    Scénario : Guillaume Sorel
                            Dessin : Guillaume Sorel                            
Couleur : Guillaume Sorel                                                        
                            
Maison d'édition : Dupuis - Aire Libre                            
Sur la plage d’un petit village des côtes galloises, l’échouage d’une énorme baleine attire la curiosité des habitants. Les policiers sur place commencent à inspecter la bête sous les regards inquiets et constatent plusieurs blessures et morsures — sans doute l’œuvre d’un requin. Pourtant, au milieu de la foule, un jeune homme nommé Gwilym, de passage dans la région, conteste la conclusion des enquêteurs : selon lui, la morsure n’est pas plus large qu’une mâchoire humaine.
La nuit venue, un couple âgé semble terrorisé dans sa maison. Une curieuse poupée a été déposée sur le pas de leur porte. Prenant cela pour une abomination, le vieil homme décide de la jeter à la mer depuis le haut de la falaise. Mais le lendemain, l’horreur s’abat sur le village : les policiers découvrent le couple massacré dans la nuit. Fait troublant, le médecin légiste est formel : ils ont été piétinés par plusieurs chevaux. Une mort incompréhensible, qui n’est que le début d’une longue série…
Durant les deux dernières années, Guillaume Sorel (auteur notamment de Bluebells Wood) s’est consacré à cet ouvrage aussi mystérieux que fascinant. Alors que le lieu semble idéal pour le tourisme et que rien n’a jamais troublé la tranquillité du village, une série de meurtres étranges par leur mode opératoire va plonger la population dans la peur et l’incompréhension. Tandis que la police mène son enquête, Gwilym, lui, ouvre la porte du fantastique et de l’horreur, cherchant des réponses dans les domaines du surnaturel.
Au début de son écriture, Guillaume Sorel s’est longtemps interrogé : « Comment faire peur en bande dessinée ? » Comme il le souligne, il est facile au cinéma ou en littérature d’imposer un rythme, un ordre, une atmosphère. Mais en bande dessinée, le lecteur peut aisément s’égarer visuellement d’une case à l’autre et perdre l’effet de tension recherché.
Pour relever ce défi, l’auteur impose dès les premières planches une angoisse diffuse, à la fois au lecteur et à son personnage principal, Gwilym. Il installe progressivement la peur, resserrant l’étau autour de ses protagonistes. Puis il joue sur le rythme de lecture, le placement précis des dialogues, des cases et des effets visuels. Parfois, il laisse croire qu’il n’y a rien d’inquiétant — une scène paisible dans un champ de blé, des papillons, une plage tranquille — avant qu’une diablerie, un corbeau, ne vienne rompre l’apaisement et ramener la terreur.
 
Mais un bon scénario ne serait rien sans un graphisme à sa hauteur. Sur ce point, aucune inquiétude : le talent de Guillaume Sorel et son utilisation magistrale de la couleur directe dépassent toutes les attentes. L’auteur se permet même quelques planches sans dialogue, où le seul dessin raconte l’histoire. Son art du cadrage renforce encore la tension, la « caméra » épousant le rythme de l’angoisse développée dans la narration.
 
Si vous êtes passionné par le fantastique, le suspense, les frissons, et que vous aimez H. P. Lovecraft, Edgar Allan Poe, Robert E. Howard ou Arthur Machen, ce livre est fait pour vous. En revanche, les lecteurs plus cartésiens risquent de se perdre dans l’aspect mystique et de ne retenir que la beauté graphique de l’ouvrage — ce qui serait vraiment dommage.
Nom d'utilisateur : LABANDEDU9
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