Nom de la série : La force de vivre
Scénario : Astier Laurent
Dessin : Astier Laurent
Couleur : Astier Laurent
Maison d'édtion : Rue de Sèvres
Cyril était aux yeux de Laurent un super héros, un surhomme, emporté par la maladie il y a une dizaine d’années. Mais Cyril était avant tout le meilleur ami de Laurent avec qui il a partagé les meilleurs moments de sa vie. Maintenant, Cyril n’est plus là, la vie continue mais il y a certaines plaies qui sont bien difficiles à refermer. Un roman graphique autobiographique, émouvant, sincère, permettant de montrer tout le talent de conteur de Laurent Astier.
« Cyril…mon pote, mon copain, mon ami. Tu étais comme un frère. Dix ans que tu es parti. Je n’y pense pas tous les jours. J’arrive même à être heureux. Enfin… la plupart du temps. Tu serais fier de moi ! Mais le vide est toujours là. ». C’est en ces mots que s’exprime Laurent au moment de monter dans sa voiture. Les blessures ne se referment pas. On vit avec et parfois il suffit de pas grand-chose, d’une chanson à la radio pour rouvrir la plaie. C’est ce qui est en train d’arriver à Laurent et qui va le pousser à retourner là où il a vu Cyril pour la dernière fois. Mais une fois arrivé sur place, Laurent se rend compte que ce jardin du souvenir où sont dispersées les cendres de son ami n’est pas le bon lieu et qu’il porte bien mal son nom. En effet si Laurent devait garder un souvenir de Cyril, cela serait la première rencontre dans cet appart que Laurent a pris en colocation après ses études, cette rencontre avec ce grand gaillard qui deviendra son meilleur ami, son ami pour la vie.
Cela fait maintenant dix ans que le meilleur ami de Laurent est parti, emporté par la maladie à l’âge de 40 ans. Dix ans pendant lesquels Laurent a vécu au fond de lui avec cette souffrance pensant que le temps, les enfants, la vie de famille, les projets lui feraient passer cette douleur encrée au plus profond de lui. Dix ans qu’il pense pouvoir coucher sur papier cette histoire qui le touche personnellement sans trouver le bon angle d’attaque pour ne pas tomber dans un récit sans consistance.
Et puis, un jour le déclic arrive et sous l’impulsion de ses sentiments et de son éditeur, Laurent décide de se mettre en scène, de prendre le rôle principal de cette nouvelle histoire pour raconter sa rencontre avec Cyril et partager les bons et les mauvais moments de cette relation amicale qui restera gravée à jamais dans son cœur.
Tout a débuté après ses études. Jeune diplômé, Laurent décide de partir sur Châteauroux avec deux amis pour emménager dans un appartement afin de créer une agence de com. C’est là qu’il va faire la connaissance de Cyril, un voisin ouvrier dans le bâtiment. L’alchimie entre les deux hommes va passer immédiatement bien que tout les oppose sauf la passion pour la musique, la gentillesse et une jeune fille nommée Virginie qui deviendra la femme de Laurent. Les années passent, l’amitié, l’amour perdurent jusqu’à ce que Cyril tombe malade et là c’est une autre histoire qui commence avec la compassion, l’impuissance, il faut profiter de chaque moment mais une chose reste, l’amitié.
Dans cette histoire autobiographie, on constate avec plaisir que la construction scénaristique n’est pas qu’une série d’évènements à la suite les uns des autres mais qu’il y a un véritable récit pouvant être lu comme un roman graphique sans penser que l’auteur évoque un fait personnel qui serait sans intérêt pour le lecteur. Cette construction scénaristique est renforcée par le fait que l’auteur se met en scène et son personnage prend logiquement ses propres traits. Laurent Astier ne cache rien, il se met à nu pour totalement se libérer et être le plus naturel et franc possible. Le résultat est payant car le lecteur va pouvoir partager tous les moments d’une réelle amitié entre deux personnes, passant des bons moments de la rencontre, des passions, de l’admiration aux mauvais moments que sont la lutte contre la maladie menant au décès.
Graphiquement, outre le fait de se mettre en scène, l’auteur va beaucoup jouer avec les expressions physiques de ses personnages, rester concentré sur les lieux, les points de détails et surtout il va alterner les mises en couleurs en bichromie par scène et par période pour renforcer le côté intimiste des situations et montrer dans quel état d’esprit il est à ce moment-là.
Je ne sais pas si à l’issue de cet album, Laurent Astier a pu refermer sa plaie. Je doute fort que cela soit aussi simple mais une chose est sûre, l’auteur aura réussi à toucher le public par son émotion, sa sincérité et il aura réussi également à rendre un très bel hommage à Cyril, cet homme qu’il a toujours considéré comme un super héros dans toutes les situations.