Titre du Tome: La petite voleuse de la Tour Eiffel
Paris, octobre 1904. Alors que le Tout-Paris s'inquiète d’un mystérieux pickpocket sévissant au pied de la Tour Eiffel, l'inspecteur Jules Dormoy repêche un noyé dans la Seine : chagrin d'amour ! À peine de
retour au poste que le défilé des victimes du voleur recommence. Il faut dire qu'il frappe fort, très fort puisqu'il a chapardé les montres des Trois Goussets, ceux qui déclenchent le coup de canon de la Tour Eiffel à midi précise. Mais plus que les toquantes, c'est le vol de la sacoche de son ami Jean-Baptiste qui intrigue l'inspecteur Dormoy. À l'intérieur, rien de moins que de quoi faire exploser la jeune Troisième République ! Il n'en faut pas plus pour mettre l'excentrique inspecteur sur la brèche. De son côté, le mystérieux voleur s'avère être une mystérieuse voleuse experte, qui plus est, en déguisement et qui tombe sur la lettre du suicidé. Touchée par tant de détresse, elle décide de le retrouver, ignorant qu’elle l’a dérobée à un inspecteur de police. Inévitablement, la rencontre va faire des étincelles. Mais si tout cela était pour le bien de la France…
Indéniablement, le début du XXe siècle est une période qui inspire Jack Manini et Hervé Richez. Après nous avoir présenté une superbe brochette de métiers oubliés, autour du
Canonnier de la Tour Eiffel, les scénaristes s'attardent ici sur un des scandales les plus scandaleux de la jeune Troisième
République. Comme c'est la rentrée, prenez vos cahiers, petit cours de rattrapage ! À sa création, après la défaite de Sedan et l'épisode de la Commune, la République est considéré comme transitoire ; avant un probable retour à la monarchie. Lorsque notre histoire débute, les monarchistes rêvent donc toujours de faire chuter cette république honnie. De leur côté, les républicains tentent de rééquilibrer la société en favorisant les officiers loyaux envers la démocratie. Ils vont même plus loin en demandant à la franc-maçonnerie de tenir un registre les concernant. C'est là que les scénaristes du XXIe siècle rentrent en piste. Ils imaginent une double intrigue autour du vol d'une mystérieuse sacoche qui contient ladite liste. S’ils ballaient le contexte historique d'un tour de main, il n'en reste pas moins que le lecteur comprend assez rapidement la gravité de la situation. L'intrigue secondaire tient dans l’idylle naissante entre la petite voleuse et le gendarme qui l'a pourchasse. Pour l'une comme pour l'autre, le ton est juste, les situations, souvent fondée sur des quiproquos et autres malentendus sont drôles, romantiques à souhait et diablement efficaces. Sans être exagérées, les particularités des personnages offrent une bonne dose d'excentricité et de chaleur qui les rendent détestables pour les uns, adorables pour les autres. Cela est renforcé par le trait de David Ratte. Le dessinateur de
Mamada est un artiste qui sait merveilleusement bien faire passer sa bonne humeur. Son trait se fait suffisamment caricatural pour
rendre le personnage antipathique ou assez réaliste pour qu'on s'attache immédiatement à lui. Alors, imaginez ce que cela peut donner avec cette fameuse petite voleuse, reine du déguisement. Et puis, il y a ce petit truc presque imperceptible dans les décors qui les rendent proches de nous, presque familiers tout en étant originaux. Pour couronner le tout, n'oublions pas la qualité de la colorisation et de la mise en page avec ses petites vignettes de décor comme autant de symbole du calme avant la tempête ou ces vignettes biscornues marquant à merveille la simultanéité.
C'est donc un vrai bonheur que la lecture de cette
Petite voleuse de la Tour Eiffel, en espérant que les auteurs et encore plein d'autres histoires de ce genre car nous, on en redemande !