Titre du Tome: Le siège de Vienne
Il est des dates qui résonnent longtemps dans les mémoires. En Autriche, il s’agit du siège de Vienne, en 1529. A travers le regard du jeune Vermisseau, jeune enfant soldat de la garde de l’archiduc Ferdinand 1er, c’est toute la folle barbarie des Hommes qui nous est montrée.
En 1529, le soleil ne se couche jamais sur l'empire de Charles Quint. Pourtant, en Europe même, cette domination sans partage est remise en cause par un autre empire. Soliman le Magnifique a décidé d'en finir avec Vienne, la grande ville à la frontière orientale. Davantage centré sur l'Espagne, Charles Quint ne peut venir en personne défendre la ville. Il y envoie son frère, l'archiduc Ferdinand 1er, accompagné de 700 arquebusiers castillans. Il enrôle également tout ce que l'Europe compte de mercenaires. C'est ainsi
que le jeune Vermisseau fait la rencontre d'un condottière germanique, Rosl Kesler. Entre les troupes castillane et germanique, la cohésion est inexistante ; et ce malgré la bonne volonté du traducteur. Les Espagnols n'ont que mépris pour ces mercenaires. Pour Vermisseau, c'est plutôt l'incompréhension : pourquoi l'empereur a-t-il pardonné l’hérésie luthérienne et massacré les artisans de la laine de Médina. Seulement, face à l'attaque des troupes de choc du sultan, les fameux janissaires, tout le monde doit répondre présent mais pour le jeune soldat, la réflexion et l'humanité semble primer sur le nom du dieu pour lequel on se bat.
S'il est une date en France que tout le monde connaît, même si personne ne sait en quoi elle consiste, c'est bien la bataille de Marignan en 1515. Ce que l'on connaît moins, c'est l'adversaire indirect du roi de France. Il s'agit du non moins célèbre Charles Quint ! Entre les deux monarques, la rivalité est à couteau tiré mais un troisième adversaire va faire éruption : le sultan Soliman le magnifique. Et une bataille va profondément marqué les Autrichiens : le siège de Vienne en 1529. C'est cette histoire que Santiaguete et Joan Bor nous racontent dans cet album. Mais attention, pas de cours de balistique ni de technique militaire ; le scénariste espagnol préfère mettre l'accent sur le cosmopolitisme de l'armée de l'archiduc. C'est à travers le regard d'un enfant soldat, Vermisseau que cette bataille nous est racontée. Cela confère une certaine candeur au récit. Mais attention, candeur ne veut pas dire naïveté ! Vermisseau est certes en construction mais il n'en demeure pas moins un citoyen de son temps : il s'interroge sur la géopolitique de son époque, se questionne sur dieu et sur les guerres que les hommes font en son nom. En un mot, il est bien plus humain et mature que tous les autres ; il est bien enfant de la Renaissance. C'est certainement ce qu'il y
a de plus intéressant dans cet album, bien plus que la stratégie militaire. Côté dessin, c'est Joan Bor qui officie. Son trait tout en rondeur fera voyager les quadras dans le temps à l'heure de RécréA2 et des premiers dessins animés japonais. Sans être ultra précis, cela reste très agréable, pour ne pas dire réconfortant. Ce qui est nettement plus décapant, c'est la mise en page. Le gaufrier classique est bel et bien dominant mais les souvenirs et flashback s'égarent dans les méandres des mémoires. Les scènes de guerre ne cachent rien de la violence et de l'anarchie régnant sur le champ de bataille. D'ailleurs, afin de renforcer le message pacifique du scénariste, la violence et la désolation sont omniprésentes.
C'est donc un album à multiple lectures que ce
Siège de Vienne ; un album historique tant sur la portée de l'événement que sur l'ambiance Renaissance mais aussi, et surtout, une profonde critique de la folie barbare des hommes qui résonne jusqu'à notre 21e siècle.