Nom de la série : Le tombeau des chasseurs
Scénario : Victor Lepointe
Dessin : Victor Lepointe
Couleur : Victor Lepointe
Maison d'édtion : GRAND ANGLE
Plongée au cœur de la bataille du Linge en compagnie d’Antoine, jeune chasseur alpin et de Victor Lepointe, l’auteur de cet ouvrage qui profite du sujet pour développer toutes les conditions de vie rencontrées dans les tranchées.
A la sortie d’un bois, sur une petite butte, cachés derrière des barbelés, un groupe de chasseurs alpins scrutent l’horizon. Il fait froid, il neige et à chaque instant, l’ennemi peut sortir du bois. Antoine, à peine 19 ans, fait partie de ce bataillon. Pour lui qui n’a jamais vu d’Allemand, d’ennemi, il les compare à des loups, ces mêmes loups qui lui faisaient peur enfant lorsqu’il était berger. Le temps passe mais ne s’améliore pas. L’avant-poste allemand se cache maintenant derrière la neige et le brouillard. Antoine se porte volontaire pour aller voir ce qu’il se passe. Il avance doucement et se met à tirer. Des traces de sang au sol lui confirment qu’il a touché « le loup ». Il s’agit bien entendu d’un Allemand, aussi jeune que lui. Son cadavre est étendu devant lui, tenant une photo de jeune femme à la main. Antoine lui prend et la conservera comme trophée et porte bonheur. Mais la guerre n’est pas finie, le bataillon de chasseurs alpins doit maintenant partir dans l’est de la France pour reconquérir l’Alsace et la Lorraine.
Les chasseurs alpins ont joué un rôle primordial durant la première guerre mondiale notamment lors de la bataille du Linge en 1915, bataille qui servira à se positionner afin d’avoir une vue sur les plaines d’Alsace. Le Lingekopf fera plus de 11000 morts de part et d’autre, tombés sous les balles, au corps à corps ou par les gaz moutarde.
Ce sujet n’arrive pas par hasard pour le dessinateur Victor Lepointe né marnais. En effet depuis tout jeune, il a une véritable passion pour la première guerre mondiale et ne cessera d’écrire et de dessiner autour de ce sujet. Une fois arrivée à maturité, une première version intitulée « La guerre des loups » sera éditée en 2014 aux éditions Pierre de Taillac puis viendra cette nouvelle édition chez Grand angle où la narration a été revue totalement.
Après de nombreuses recherches pour asseoir les faits historiques, les uniformes, les témoignages, l’auteur va travailler autour de son personnage Antoine Granet pour lui faire vivre les pires cauchemars, l’entraînant d’un champ de bataille et à un autre, le positionnant au cœur des combats pour encore plus de réalisme. Ainsi le lecteur va suivre ce jeune homme de bout en bout à travers une voix off qui accompagne le récit mais aussi à travers le dessin puisque le lecteur va se retrouver également au cœur des combats.
C’est d’ailleurs l’originalité ou l’inconvénient de cet album selon les points de vue. Les personnages et donc les lecteurs ne vont pas sortir la tête des tranchées et vont enchaîner combat sur combat sans vraiment d’histoire ou de fiction autour. En revanche, tout le monde s’accordera à dire que d’un point de vue pédagogique, on apprend à ressentir toutes les conditions de vie et de mort de ces hommes coincés sur les champs de bataille, à tel point que le personnage principal et sûrement d’autres ont une haine farouche envers un ennemi qu’il imagine en monstre, en loup alors qu’il ne l’ont jamais vu. Cela prouve la force de la manipulation de masse en cas de conflit.
Niveau dessin, planche en couleur directe avec un jeu de couleurs intelligemment travaillé pour faire ressortir toutes les ambiances angoissantes à travers ces nappes de brouillard quasi permanentes. Des couleurs sombres proches de la nuit et des ténèbres.
Un récit assez classique mais qui a pour originalité de ne pas tomber dans un roman fiction ni dans un manuel historique, l’auteur préférant s’attacher au cœur des hommes, à ces messieurs tout le monde qui ont vécu des choses quasiment inimaginables .