Nom de la série : Les 5 Terres
Tome : 14
Titre du Tome: Juste des ennemis
Scénario : Lewelyn
Dessin : Jérôme Lereculey
Couleur : Dimitris Martinos
Maison d'édition : Delcourt
La victoire du roi Rinzem a un gout d’inachevé ! Malgré sa victoire navale, son fils Khalden n’a pas capturé la reine Astrelia. Pire ! Sur Arnor, des rebelles ont tué la fille préférée du roi ! C’est la pointe de Drun qui est chargée de rétablir l'ordre. Une mission simple, du moins en apparence. Le temps passe mais une chose demeure : chaque nouvel album des 5 Terres est une claque magistrale pour les lecteurs !
Les ours du roi Rinzem ont conquis Angleon. Seulement la victoire a un goût amer car une grosse partie de la population de la cité a réussi à s’enfuir. Désœuvrés par l’absence d’ennemis, les soldats errent dans les rues de la capitale en pillant et buvant. Cette victoire n’est pas totale non plus car la flotte, menée par Khalden, le fils aîné du roi, n’a pas réussi à capturer la reine Astrelia. Il a pourtant coulé plus de la moitié de la flotte des félins mais son père ne lui accorde aucun satisfecit. Il l’informe par ailleurs de la mort de sa sœur Harin, tuée par des loups révoltés. C’est le yern Holdan qui est chargé de retourner sur Arnor afin de rétablir l’ordre et venger la princesse. Il est à la tête des pointes de Drun et de Ludmir. Au sein de la première, ces soldats d’élite s’interrogent : « Pourquoi ont-ils massacré tous les félins, soldats comme civils ? Cette mission est-elle une punition après le fiasco de la prise d’Angleon ? ». C’est sans compter sur les rivalités qui hantent les deux pointes. Entre le capitaine Ludmir et le sergent Akar, le passif devient toujours plus pesant. Tous doivent cependant se méfier car les loups ont bien l’intention de vendre chèrement leur peau…
Après deux cycles explosifs et une ouverture qui n’était pas en reste, on était en droit de se demander si les scénaristes n’allaient pas un peu lever le pied. Qu’on se rassure, il n’en est rien ! Si le premier cycle pariait sur les secrets d’alcôve et les conspirations ; si le deuxième était plus policier, ce troisième joue sur la guerre et la brutalité. Quand on sait qu’il s’agit du cycle des ours, on n’en attendait pas moins ! Après la conquête d’Angleon, la cité des félins, les ours devraient logiquement dominer les 5 Terres. Pourtant, cette victoire n’est qu’un trompe-l’œil. Pas besoin d’aller voir ce qui se passe ailleurs. Les ours victorieux pillent et s’enivrent tant ils s’ennuient. La Reine Astrelia leur a échappé et les enfants du roi ont été kidnappés. C’est la première chose qui frappe avec ce troisème cycle. Là où on était habitué à lire cinq ou six intrigues en même temps, on n’en retrouve guère que trois ici. Entendons-nous bien, ce n’est absolument pas désagréable car cela permet aux scénaristes d’étoffer davantage les personnages. Surtout, ils conservent la possibilité, et ils ne s’en privent pas, d’ajouter ici et là de nouvelles cordes à leur arc. C’est ainsi que les loups prennent une place inédite dans ce cycle et nul doute qu’on n’a pas fini d’en entendre parler. Les véritables héros de cet album sont une nouvelle fois les soldats que forment la pointe de Drun. Derrière une unité de façade, de nombreuses interrogations se font jour. La rivalité, elle, s’établit plutôt entre les deux pointes envoyées pour rétablir l’ordre sur Arnor. Ce sont les relations interpersonnelles qui forment le cœur de l’intrigue et on s’identifie aisément à tel ou tel personnage. Pourtant, l’anthropomorphisme n’est pas toujours évident. Toujours bien assisté par Didier Poli, Jérôme Lereculey propose une palette de personnages extrêmement spectaculaires. Les ours et les loups sont facilement identifiables par toute une série de détails extrêmement bien sentis. Chacun gravite dans des univers bien définis et toujours aussi pointilleusement étudiés. Pour les habitués de la saga, l’extraordinaire mise en page est presque devenue quelque chose d’ordinaire ! La succession de petites vignettes de dialogue sur de grandes cases pour préciser le cadre ; des cases panoramiques pour ouvrir ou clore une planche ou encore des constructions en miroir sur deux pages surmontées d’un paysage en cinémascope, on s’habitue à l’excellence ! C’est pourtant indispensable de rappeler l’impressionnant travail des dessinateurs.
Les artistes ont toujours affirmé vouloir réaliser une fresque historico-fantastique à grand spectacle. L’éditeur parlait même d’une version bande-dessinée de Game of Thrones. Tous ont démarré pied au plancher et ce 14e opus prouve que, non seulement, ils n’ont pas ralenti mais qu’ils en ont encore sous le pied. Pour le lecteur, c’est l’assurance de se prendre, comme à chaque fois, une claque magistrale.