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Les fesses à Bardot Les fesses à Bardot

Les fesses à Bardot

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Nom de la série : Les fesses à Bardot
Scénario : Philippe PELAEZ
Dessin : Gaël SEJOURNE
Couleur : Gaël SEJOURNE
Maison d'édtion : Grand Angle

Il ne se passe jamais rien à Trougnac ! Alors, lorsqu’un jeune homme affirmant faire des repérages pour le cinéma débarque, c’est le branle-bas-de-combat ! Et quand il montre une photographie avec les fesses à Bardot, tout le village se met en quatre pour faire venir la star ! Magnifique ode joyeuse au cinéma français autant que critique de la vanité, Les fesses à Bardot est magique !
Trougnac est un gros village de près de 3000 habitants dont le principal sujet de conversation est l’installation d’une pharmacie. Il faut dire que les habitants sont obligés d’aller à celle de Poil et que la rivalité entre les deux communes ne s’arrête pas à cette officine. A Trougnac, il y a aussi le château et son duc et surtout l’Eden, son cinéma, voisin de l’Église. Mais dans ce village, il ne se passe jamais rien ! C’est pourtant dans ce charmant bourg que s’arrête Conrad Knapp, avec un K mais qu’on ne le prononce pas. Au café du village, il affirme travailler pour le cinéma, être à la recherche d’un village pour un prochain film de Jean Gabin et, en gage de sincérité, il montre une photographie issue de En cas de malheur montrant les fesses de Brigitte Bardot. Immédiatement, le cliché fait sensation et tout le village se met en quatre pour influencer le repéreur. Tout le village ? Non. Quelques irréductibles menés par le curé ne veulent pas voir la starlette et sa sulfureuse réputation dans le village. Et puis il y a Julie, la fille du projectionniste. Si elle rêve de brûler les planches parisiennes, elle est aussi très observatrice…
Un jeune homme bien sous tout rapport débarque avec une photo affriolante des fesses de Brigitte Bardot dans un bourg en manque de reconnaissance. Cette photo, c’est une merveilleuse carte de visite et tout le village se laisse prendre au jeu. Cette histoire n’a malheureusement rien d’original tant les Deep fake utilisant l’image des stars pour soutirer de l’argent sont devenues des choses banales. Mais notre histoire se déroule à une époque où les réseaux sociaux et l’IA n’étaient encore que science-fiction, une époque où le cinéma cristallisait toutes les passions. Les habitants de Trougnac ne font pas exception. Grâce à la générosité du duc et de quelques amis parisiens, le village, qui n’a pas de pharmacie, s’est doté d’un cinéma. Régulièrement, un comité se réunit pour choisir les films qui seront à l’affiche. Et comme dans tout village des années 50, il y a un curé, un résistant communiste et un gaulliste… une sorte de Don Camillo à la française. Si le lecteur saisit rapidement le pot aux roses, on se demande quand la vérité va éclater. On comprend que plus le temps passe et plus les révélations risquent d’être violentes. Néanmoins, le scénariste joue avec nos nerfs avec des rebondissements et des péripéties magistralement menées. Il faut dire que Philippe Pelaez imagine une brochette de personnages très haut en couleur. Il nous amuse également avec leur ambivalence, leur confère de piètres pensés sous des atours de preux chevalier. Pour ne rien arranger, il imagine des dialogues taillés au cordeau. C’est cinglant, c’est vif et c’est très drôle ! On n’est pas loin d’Audiard (dont on sent d’inspiration) ou de Don Camillo. On imagine aussi le travail préparatoire car les références aux œuvres d’après guerre sont très nombreuses. On n’en attendait pas moins d’un album parlant du 7e art ! Comme ils s’amusent à le faire remarquer sur la page de garde, le scénariste est épaulé par le dessinateur. À moins que ce ne soit le dessinateur qui soit soutenu par le scénariste ? Cette fusion entre les deux est indéniable. Le dessinateur donne une vraie tronche à ces personnages.  Là aussi, on n’est pas loin des films d’Autant Lara, de Clouzot ou de Lautner. Ce style caricatural accentue l’ambiguïté des personnages pour notre plus grand plaisir. Il renforce également leurs émotions dans une hypocrisie totalement jouissive. Gaël Séjourné n’en oublie pas d’apporter une touche de vivacité digne du 7e art. Les promenades sont dynamiques, les dialogues sont précis et même les prêches du curé deviennent enflammés. L’ensemble se place dans des décors passe-partout d’une grande finesse et précision. Notons enfin que la colorisation s’effectue dans des teintes délavées qui ne sont pas sans faire penser à la colorisation des films d’époque.
Quel régal que les Fesses à Bardot. Non pas que le postérieur de la star nous intéresse outre mesure mais il est à l’origine d’un album bien construit et particulièrement drôle. Un album que je vous recommande chaudement.

A propos du chroniqueur

Nom d'utilisateur : boil

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