Les sanctuaires

   Sébastien, jeune dessinateur, se réveille un matin avec une jambe partiellement paralysée. C’est soudain, incompréhensible, sans cause visible. Il entame des examens médicaux ; IRM, spécialistes, kiné : tout semble normal. On ne trouve rien. Pourtant, la douleur et la gêne sont bien là. L'inquiétude grandit. Notre protagoniste entre alors dans une zone de flou et de doute dû à des douleurs restant sans explication.
Ne pas être cru ou compris accentue sa souffrance. Sébastien commence à douter de lui-même. Il s’isole. Sa vie professionnelle et personnelle en souffre. L’angoisse devient un second symptôme.
Devant l'impasse médicale, il décide d'explorer des pratiques alternatives : médecine chinoise, hypnose, chi-kung, Yi-King. Il ne s’y jette pas aveuglément. Il doute, observe, expérimente. Il se lance dans une quête prudente mais sincère.
Au fil de ses pratiques, Sébastien commence à remonter le fil de son histoire personnelle. Des souvenirs ressurgissent faisant basculer parfois le récit dans le symbolique ou l’onirique. Le corps devient miroir de l’inconscient.
En arrière-plan, une relation affective importante refait surface — une femme, une séparation, un amour intense mais douloureux. Le lien entre cette blessure affective et la douleur physique s’insinue peu à peu.
Sébastien retourne alors au Japon, un lieu marquant de sa vie. Un voyage non pas touristique mais existentiel. Là-bas, il reconnectera des fragments de lui-même, entre passé, absence, silence et rituel. Trouvera-t-il des réponses, ou au moins une forme de paix ?

   Avec ce roman graphique Sébastien Pons documente un cheminement singulier vers une forme de guérison, ou plutôt de reconnexion où il va apprendre petit à petit à vivre avec la douleur autrement. Il explore le Yi-King, l’hypnose, la méditation, le qi gong. Pas comme un adepte, mais comme quelqu’un qui n’a plus le choix. Chaque pratique devient un miroir. Par moments, il semble fuir ; à d’autres, il affronte. Mais toujours, il cherche.
Dans ce récit, l'auteur ne suit pas une logique classique : il avance par méandres, par souvenirs, par rêveries. On glisse de la réalité brute à des scènes symboliques, presque oniriques, où le corps parle en métaphores. Les douleurs deviennent des personnages, les émotions prennent forme. On assiste à la lente réorganisation d’un homme autour de son propre mystère.
coté graphisme,le dessin, en aquarelle douce fait de cadrages sobres, suit le rythme de l’introspection. Il ne surligne rien. Il laisse de l’espace au récit, une grande place à l’émotion, à la confusion, et à la beauté. Certaines pages sont presque silencieuses, comme des respirations entre deux pensées trop lourdes.
En filigrane, de cette histoire d’amour, lointaine, incertaine, une blessure physique fait ressurgir les fêlures affectives. Le chemin est flou, parfois ésotérique, souvent solitaire. Mais ce flou est sincère. C’est une traversée entre l’inquiétude et l’acceptation. Un voyage vers quelque chose de plus profond que la guérison?: une forme de présence à soi.
Cette BD est une œuvre lente, honnête et profondément humaine. Elle parle à ceux qui ont connu le doute face à leur corps, aux émotions qui débordent, au besoin d’écouter autrement. C’est un livre qui ne “soigne” pas, mais qui apaise. 
Ici, L’amour, le doute et l’exil intérieur se croisent. Et au fil des pages, on comprend que Les Sanctuaires, ce ne sont pas des lieux, mais des refuges intérieurs. Une BD qui ne guérit pas, mais qui appaise et ouvre l'esprit.