Nom de la série : les yeux doux
Scénario : Corbeyran Eric
Dessin : Colline Michel
Couleur : Saint-Blancat Cyril
Maison d'édtion : Glénat
Quoi de mieux dans une société surpeuplée que d’avoir un monde du travail et du commerce régi par de grandes sociétés qui offrent le plein emploi et l’abondance sous les yeux de multiples pin-up placardées sur les murs de la ville. En réalité cette société est un leurre, chaque égarement mène à l’exclusion, chaque pensée mène à l’isolement, heureusement Eric Corbeyran et Michel Colline sont là pour mener la révolte et la mettre en place.
Arsène travaille à l’atelier universel, aujourd’hui il est sur une chaîne de fabrication de grille-pain, lui et tous ses camarades s’activent mais la cadence est trop élevée. Marcel remet de l’huile et Momo tente de réduire la machine mais rien n’y fait, on court à la catastrophe. Arsène ne voit qu’une solution, appuyer sur le bouton rouge pour stopper la chaîne. Une initiative qui sauve ses camarades mais qui n’est pas du goût du chef. Arsène est licencié sur le champ. Il regagne alors son appartement qu’il partage avec sa sœur et durant tout le trajet, pensif, il s’inquiète pour son avenir car l’atelier universel a le monopole sur le monde du travail et une fois blacklisté, on devient un paria. Sa sœur Annabelle tente de le rassurer mais Arsène voit le monde s’écrouler, pour lui, il n’est plus rien et il a le sentiment d’être effacé du système. Pour se détendre, il va prendre une douche et à sa sortie, il se voit disparaître dans le miroir jusqu’à devenir invisible. Pour sauver leur vie, Annabelle va se mettre à voler de la nourriture dans les magasins. C’est à ce moment qu’Anatole va la surprendre à travers les vidéos de surveillance installées par les « Yeux doux ». Annabelle est aussitôt arrêtée et son sort en est jeté mais Anatole qui est tombé sous son charme va trafiquer les vidéos pour l’innocenter. Un geste qui va le faire passer d’employé modèle à hors la loi avec toutes les conséquences que cela comporte dans cette société régie par les Yeux doux
Malgré les apparences d’une société moderne, où la technologique domine sous les Yeux doux de pin-up placardées sur tous les murs de la ville, la société décrite et mise en scène par Eric Corbeyran est loin du paradis. En effet, derrière le masque se cache une société gérée par un seul groupe de personnes où l’erreur n’est pas possible et où chaque égarement mène à l’isolement voire à l’exclusion, à l’image d’Arsène qui devient invisible aux yeux de la société. Cette société imaginée par Eric Corbeyran n’est pas très loin de notre société actuelle, outre le fait de la faire vivre dans un univers rétro futuriste qui mêle à la fois modernité, comme les usines et moyens de transport, et les tenues vestimentaires des protagonistes et leurs conditions de vie à la limite de la pauvreté. Une société à deux vitesses fortement marquée par ses différences, un écart qui ne peut mener qu’à la révolte.
Cette révolte va s’organiser autour de personnages forts et charismatiques, un jeu de rôle parfaitement maîtrisé où chaque personnage apporte sa pierre à l’édifice. Une très belle mise en scène orchestrée par le scénariste.
Quant au dessin de Michel Colline qui accompagne cette histoire, il est tout simplement extraordinaire, à l’image de l’histoire, détaillé, avec un grain de trait qui donne une ambiance particulière à la fois rétro et moderne qui ne faiblit pas sur les 180 pages que compte l’album. Un trait, une ambiance qui nous font penser à Cyrille Pomes. Le Dessin de Michel Colline est également mis en valeur par un découpage panoramique voire cinématographique et qui prend une dimension particulière également grâce aux couleurs de Cyril Saint-Blancat qui a su donner le ton juste à cette histoire.