Nom de la série : Little England
Scénario : Jean-Claude Van Rijckeghem
Dessin : Thomas De Caju
Couleur : Thomas De Caju
Maison d'édition : Paquet
A Moulmein, en cette année 1941, la vie s’écoule paisiblement. Pour Jonathan, le fils du commandant de la base aérienne, tiraillé entre son éducation anglaise paternelle et la culture birmane de sa mere, c’est l’heure des premiers émois. C’était juste avant que la guerre n’éclate. Little England est un magnifique album mêlant récit d’initiation, de guerre et d’espionnage. A consommer sans modération.
Bien que la guerre soit déjà commencée, la petite ville de Moulmein en Birmanie, aussi appelée petite Angleterre, semble à l’égard du conflit. Il y a bien quelques manœuvres japonaises mais l’essentiel des Britanniques vit paisiblement. Jonathan, le fils du commandant de la base aérienne, vit à l’heure anglaise. Pourtant, il est davantage attiré par la Birmanie véritable, celle des pagodes, de la jungle et de sa mère mourante. Pourtant, à 16 ans, il se sent aussi poussé des ailes pour la gente féminine et en particulier pour Rebecca Kincaid. Et puis le Japon attaque la base US de Pearl Harbor et la guerre se rapproche. Et puis, un pilote américain prend Jonathan sous son aile et lui fait visiter le Blue Moon, à moitié cabaret, à moitié bordel. C’est là que le jeune homme fait la rencontre de la sublime chanteuse Ruby. Dans l’esprit et le cœur de Jonathan, tout va s’entrechoquer...
Alors que les commémorations des 80 ans de la fin de la 2nde Guerre mondiale prendront fin début septembre, les éditions Paquet poursuivent la collection Mémoire 1939-1945 avec le très beau Little England. Je dis très beau car, personne ne pourra contredire, la couverture est tout simplement sublime. Cette sensuelle jeune femme qui, derrière son micro iconique, nous interpelle par son regard affirmé ne peut pas laisser indifférent. Une fois ouvert, on découvre une intrigue à la construction assez classique. Jean-claude van Rijckeghem nous place dans un premier temps le décor et les personnages. C’est ainsi qu’on fait la rencontre de Jonathan. Le jeune homme, fils du commandant d’une base aérienne, est tiraillée entre le flegme et l’autorité britannique de son père et la culture birmane de sa mère mourante. Dans cette Birmanie anglaise, la tension est pourtant à son comble. Les bruits de bottes nippons se font toujours plus présents et les velléités indépendantistes se font toujours plus pressantes. Bien sûr, Jonathan est au courant de tout cela mais ses principales préoccupations s’orientent plutôt du côté de la gente féminine. Ce qui va créer une fracture dans sa vie, c’est l’irruption d’un pilote US qui va utiliser le jeune homme pour approcher une somptueuse chanteuse de cabaret. À partir de là, les péripéties vont s’enchaîner à haute vitesse et à tous les niveaux. Il y aura les petits accrochages entre le père et le fils mais aussi les premières attaques japonaises. Cela donne un album au rythme très agréable bien qu'assez long. On se retrouve ainsi à tourner les pages sans s’en rendre compte mais aussi sans jamais perdre le fil et sans jamais être perdu ! Je dois pourtant avouer être resté un peu sur ma faim par une épilogue un peu trop ouverte à mon goût. Certes, on suit le jeune Jonathan mais quid de Ruby et, pour le commun des mortels, de la guerre et de la Birmanie. Cette modeste critique est pourtant peu de choses si on la compare à la qualité du trait de Thomas du Caju. On connaît le dessinateur belge pour sa passion pour les avions et la sensualité de ses personnages féminins. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est comme un poisson dans l’eau . Tous les personnages ont un aura, un charisme extraordinaire mais les héroïnes, tant Ruby que Rebecca sont littéralement à tomber par terre. Attention, tout ça sans vulgarité ! Les engins volants sont tout aussi somptueux même s’ils doivent partager la vedette avec des bateaux et autres véhicules à quatre roues. Mais du Caju distille aussi une atmosphère très pesante avec des décors d’une grande précision et d’une grande beauté, avec une construction qui privilégie toujours les dialogues et les rapports entre les personnages et une dynamique absolument irréprochable. C’est beau, c’est vif et percutant et surtout, cela renforce le plaisir de lecture. Si vous rajoutez à cela une colorisation dans des teintes un peu délavées qui correspond à la perfection à l’époque et au pays, c’est un pur dépaysement, tant spatial que chronologique. On peut noter enfin le très joli cahier graphique réservé à la première édition. C’est alors un pur plaisir que de voir le travail graphique de Thomas du Caju mais aussi un ravissement pour les yeux face aux crayonnés plein de sensualité.
On l’aura donc compris, ce Little England est une excellente aventure mêlant récit d’initiation, guerre mondiale et espionnage. Un cocktail très agréable malgré les presque 100 pages. Un album à découvrir à côté de la piscine.