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Lointains mes mots Lointains mes mots

Lointains mes mots

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Nom de la série : Lointains mes mots
Scénario : Anaële HERMANS
Dessin : Sandrine REVEL
Couleur : Sandrine REVEL
Maison d'édtion : Dargaud

Claire aime les mots. A la suite d’un accident, ils lui échappent et c’est toute son existence qui s’en trouve bouleversée. Heureusement, Claire rencontre Beatriz qui va lui faire découvrir la plongée. A travers cette quête de reconstruction, c’est une véritable ode à l’humanité et à la résilience auxquels nous invitent les artistes.
Claire est une amoureuse des mots. Enfant déjà, ses grands-parents lui offraient des tas de livres qu’elle dévorait d’une traite. Adulte, elle s’est installée à Madrid où elle travaille comme traductrice et assure des cours de linguistique. Malheureusement, à la suite d’un AVC, Claire a perdu une partie de ses facultés : les mots lui échappent !  Pour ne rien arranger, se sentant inférieur, elle rompt avec son petit ami. En perte absolue de repère, elle se rend en Galice afin d’apporter son soutien aux volontaires qui nettoient les plages, après le naufrage du Prestige. Elle fait la rencontre de Beatriz qui lui loue un gîte. Biologiste marine, elle aussi a quitté la capitale. Par amour, elle a suivi son mari, épris de liberté, sur la côte et ils ne le regrettent pas. Mais Claire échange aussi avec les pêcheurs cloués à terre par la marée noire, avec les hôteliers contraints à une saison blanche ; tous lui racontent leur vie, leurs doutes mais surtout leurs espoirs. Et puis Claire va s’initier à la plongée et découvrir une mer profonde et silencieuse, du moins en apparence…
Je dois bien avouer que, lorsque j’ai reçu cet album, je n’avais pas la moindre idée de ce qui m’attendait. Ce titre et cette couverture mi terrestre, mi- aquatique, ultra colorée; tout ça me laissait plutôt perplexe. Généralement, c’est au moment d’ouvrir l’album que tout s’éclaire. Eh bien, rien de tout cela ici ! Le lecteur se retrouve propulsé en Galice, l’extrême nord-ouest de l’Espagne, peu après la terrible catastrophe du pétrolier Prestige. Vous n’en avez aucun souvenir ? Peu importe, ce n’est que le décor. On fait la rencontre de Claire, une bénévole. Patiemment et avec opiniâtreté, elle s’acharne à rendre son aspect originel à un rocher. Rien d’extraordinaire sauf que Claire est comme ce rocher: bien plus cabossée qu’elle ne le donne à voir. À travers quelques flashbacks et beaucoup d’échanges avec ses hôtes, le lecteur apprend et comprend ses traumatismes. Claire vivait par et pour les mots. Lectrice acharnée et traductrice reconnue, elle aimait les mots. À la suite d’un accident de la vie, ils lui échappent désormais et le monde de Claire s’effondre autour d’elle. À travers cette comédie romantique, Anaële Hermans nous raconte l’impressionnant trajet vers l’acceptation du handicap invisible et le travail de reconstruction. La scénariste ne masque rien des regards des autres, de leur incompréhension et parfois même de leur rejet. Elle préfère cependant s’appuyer sur la bienveillance et l’humanité. À travers la métaphore de la plongée, on va assister à une sorte de résurrection de Claire. Si le sujet est extrêmement puissant émotionnellement, il le doit aussi au trait de Sandrine Revel. Dans des décors d’inspiration impressionniste, les personnages dégagent un charisme fou. Les traits et les hachures sont omniprésents, apportant beaucoup de poésie au dessin. Les escapades sous-marines sont somptueuses et on comprend les raisons de la passion des deux femmes mais aussi de tous les gens de mer. Bien qu’assez conventionnelle, la mise en page est variée. Les angles de vue font la part belle aux échanges et c’est évident vu le thème. La colorisation pastel apporte beaucoup de douceur mais elle est aussi capable d’être beaucoup plus violente et variée pour les flashbacks.
Loin de m’y attendre, j’ai véritablement été estomaqué par cette ode à la résilience, cette quête d’une renaissance basée sur la bienveillance et l’humanité ; en un mot par cet excellent album Lointain, mes mots.

A propos du chroniqueur

Nom d'utilisateur : boil

Nombre de chroniques publiées : 72