Nom de la série : Metropolia
Tome : 1
Titre du Tome: Berlin 2099
Scénario : Fred DUVAL
Dessin : Ingo RÖMLING
Couleur : Christophe BOUCHARD
Maison d'édtion : Dargaud
Dans un Berlin futuriste où la marche à pied est devenue une nécessité, Sasha rêve de retrouver sa dulcinée outre atlantique. Pour cela, il accepte une enquête sur une mystérieuse tueuse surnommée Cendrillon. Il est loin de se douter dans quoi il a mis les pieds. Fred Duval et Ingo Römling nous proposent une enquête dans un futur pas si lointain : une extraordinaire réussite !!
Depuis la moitié du XXe siècle, le monde subit une crise de l’énergie. La voiture individuelle est réservée à une élite fortunée, l’avion est un luxe inabordable et même les transports en commun sont redevenus payants. La seule solution : la marche à pied. Berlin est devenue la ville la peuplée d’Europe mais également la plus vaste. Une véritable ville monde ! De plus en plus de personnes y naissent, y vivent et vont y mourir sans en être jamais sortis. C’est dans cet univers que vit Sasha. Lui rêve de traverser l’Atlantique pour retrouver sa bien-aimée aux États-Unis. Pour cela, il enchaîne les missions très bien payées et parfois dangereuses pour le compte de Metropolia. Cette fois-ci, il doit découvrir l’identité d’une mystérieuse tueuse surnommée Cendrillon depuis qu’elle a perdu un escarpin sur les lieux d’un meurtre. Pour cette mission Sasha va se faire passer pour un architecte qui doit rénover des parties communes d’un vieil immeuble, mais toujours chic, connecté. Il a carte blanche et surtout accès à tous les appartements, même ceux cachés. Dès sa première visite, il tombe sur un cadavre mort au moins deux ans auparavant. De fil en aiguille, Sacha démêle le vrai du faux, remonte les pistes les unes après les autres. Il est pourtant loin de se douter de l’ampleur de la galère dans laquelle il vient de se fourrer…
Pour les amateurs de bandes dessinées, il est assez déstabilisant de voir le scénariste Fred Duval réduit à Renaissance et aux Nymphéas noirs sur la couverture. Et puis on se dit que cette nouvelle série doit être un mixte entre les deux univers. C’est pourtant au conte de fées que l’on pense à l’ouverture de l’album. Lors d’une vente aux enchères, un richissime acheteur est assassiné par une tueuse qui perd un escarpin en s’échappant. Dans ce Berlin futuriste où la marche à pied est devenue le seul moyen de déplacement, tout en étant source de rémunération, ce soulier est un joli pied de nez à la société. En marge de l’enquête officielle, le consortium Metropolia engage son propre enquêteur en la personne de Sasha. Sous la couverture d’un architecte préparant une rénovation, il va effectuer ses recherches au sein du Florian, un immeuble des années 2030 doté de l’IA. Cette atmosphère d’anticipation est maîtrisée à merveille par Fred Duval. Les thèmes sont parfaitement d’actualité : l’IA bien évidemment, dans tout ce qu’elle peut avoir d’ambivalent, mais également le dérèglement climatique et les questions liées aux transports, sans oublier un transhumanisme assumé. Outre cet univers futuriste mi-angoissant mi-idyllique, le scénariste imagine également une excellente enquête policière avec un empilement de cadavres, des rebondissements variés parfaitement dosés et un revirement de situation au cours de laquelle le chasseur devient la proie. C’est explosif et super addictif mais cela laisse aussi le temps de se questionner sur l’avenir qui se profile. C’est l’allemand Ingo Römling qui se charge du dessin. Après une incartade chez l’Oncle Sam, le dessinateur de Malcolm Max revient chez Dargaud. Personnages attachants moins anguleux, mise en page millimétrée et décors clairement futuristes, le dessinateur des Chroniques de l’univers livre une copie franchement extraordinaire. Un pied dans le présent (voire dans le passé avec les casques à pointe des soldats), l’autre dans le futur, il saisit totalement la philosophie de l’anticipation pour notre plus grand plaisir. N’oublions pas de préciser que la colorisation de Christophe Bouchard agit comme un exhausteur de sensations en créant des ambiances tranchées et parfaitement identifiables.
Les éditions Dargaud ont parfaitement raison de mettre en avant le premier opus de cette nouvelle série. Outre le talent de ses auteurs, il prouve qu’on peut jouer avec le futur avec énormément de justesse et de fluidité tout en lui accolant une enquête policière à haute intensité. On a hâte de découvrir la prochaine enquête de Sacha.