Nom de la série : Orients perdus, l aventure de Théodore Lascaris
Tome : T01
Titre du Tome: Nice Malte L Egypte
Scénario : Jacques Ferrandez
Dessin : Jacques Ferrandez
Couleur : Jacques Ferrandez
Maison d'édition : Daniel Maghen
Avec Orients perdus, Jacques Ferrandez nous entraîne dans un vaste roman graphique aux accents historiques et romanesques. En effet, l’auteur nous plonge dans la vie romancée de Théodore Lascaris, un jeune aristocrate niçois descendant des empereurs de Byzance. Un ouvrage aussi intéressant qu’instructif !
En 1792, alors que la Révolution française gronde et que Nice est envahie par les troupes révolutionnaires, Lascaris, peintre et musicien insouciant, quitte sa ville natale pour échapper à la vindicte révolutionnaire. Sans le savoir, mais en y rêvant, il s’apprête à avoir destin hors du commun !
Son périple le mène d’abord à Vintimille, puis à Malte, où il se retrouve pris dans les intrigues politiques et amoureuses de l’Ordre des Chevaliers, dont un aïeul a été, un siècle auparavant, un dirigeant aussi respecté que craint. Il s’y fait une belle place mais son amour des femmes va lui procurer quelques sueurs froides... Il décide donc de se joindre à un jeune et fougueux général français pour une campagne en Egypte : Napoléon Bonaparte.
C’est lors de cette campagne d’Orient en 1798, que son destin bascule. Engagé comme intendant, il découvre un pays en pleine effervescence, entre conquêtes militaires, intrigues diplomatiques et rencontres inattendues, comme celle de Mariam, une jeune femme échappée d’un harem.
L’auteur s’inspire ici d’un personnage réel pour tisser une fresque ambitieuse, mêlant aventure, romance et grande Histoire. Le premier tome pose les bases d’un diptyque prometteur, où chaque étape du voyage de Lascaris révèle un peu plus les contradictions et les rêves d’un homme en quête de sens.
Ferrandez excelle dans l’art de mêler fiction et réalité historique. Le scénario, dense et documenté, restitue avec beaucoup de précision le contexte politique et social de la fin du XVIIIe siècle : la chute de Nice sous la Révolution, les rivalités à Malte, et surtout, la campagne d’Égypte de Bonaparte, où se croisent ambitions militaires et rêves scientifiques.
Cette richesse est pour moi à la fois la force et la limite de ce récit. La densité des événements, accumulés parfois sans respiration, peut donner l’impression d’un récit trop compact, au détriment du rythme. Certaines séquences s’étirent alors qu’on aimerait que l’intrigue se resserre sur l’essentiel. On aurait aimé que Ferrandez, habitué aux récits plus épurés comme dans Les Carnets d’Orient, trouve un équilibre entre la rigueur historique et la mise en récit. Malgré tout, l’histoire reste captivante, portée par un héros attachant, à la fois naïf et audacieux, dont les choix reflètent les tourments de son époque.
Mais ce qui m’a le plus marqué, ce sont les dessins, sans conteste le point fort de l’album. Ferrandez, fidèle à son style, utilise l’aquarelle pour donner vie aux paysages et aux visages de cette aventure méditerranéenne. Chaque planche est une invitation au voyage : les ruelles de Nice, les ports de Malte, les déserts égyptiens, et les pyramides se déploient sous nos yeux avec une incroyable. Les couleurs douces et lumineuses renforcent cette sensation d’immersion.
« Orients perdus » est donc une œuvre ambitieuse, où l’Histoire et la fiction s’entrelacent magnifiquement. Si le scénario est peut-être trop dense pour certains lecteurs, les dessins suffisent à en faire un album remarquable. On attend avec impatience le second tome, qui promet de clore cette aventure en apothéose !