Nom de la série : SIX
Tome : 3
Titre du Tome: Le serment de Gabaldon
Scénario : Philippe PELAEZ
Dessin : Javier CASADO
Couleur : Javier CASADO
Maison d'édition : Dargaud
En mauvaise posture, Quintus livre à ses geôliers l’histoire du conquistador Gabaldon. Un album de transition qui apporte autant de réponses qu’il ne pose de questions. En attendant un final en apothéose !
Alors que Royal, Elsie et Roxanne sont partis de leur côté ; alors que Kid et Tchitchi sont partis consulter un vieux sorcier indien ; Quintus se retrouve seul face à tous ceux qui les recherchent. Très rapidement, la situation vire à son désavantage. Même s’il peut compter sur des désaccords, il se retrouve vite attaché à un pilori à devoir supporter les coups de fouet de son ancien colonel et geôlier. Il n’est pas le seul à vouloir faire parler le déserteur mais ce qu’il va leur apprendre va faire exploser le groupe. Face à eux se trouve l’entrée d’une mine. À l’intérieur, on pourrait soupçonner de nombreux filons l’or. Pourtant, Quintus leur fait un aveu peu courant : cette mine lui fait peur ! et il leur raconte une légende sur des conquistadors fantômes. N’écoutant que leur soif de l’or, deux cavaliers entrent et ressortent, décapités pour l’un et fou pour le second. Toutes ces révélations sèment la discorde et l’arrivée de Royal, Elsie et Roxanne ne fait que renforcer les tensions…
Quel que soit le domaine, mettre face à face des héros que tout oppose est souvent à l’origine d’un succès. La recette n’est pas pour autant assurée et multiplier les personnages reste risqué. C’est pourtant le choix que fait Philippe Pelaez pour son western Six. Il faut dire que le scénariste a réellement pris des extrêmes : un jeune orphelin androgyne, un déserteur, une prostituée, un indien et un esclave en fuite et une nonne défroquée. Si vous rajoutez que chacun est pourchassé par les pires crapules de l’Ouest, vous obtenez un casting cinq étoiles ! Encore faut-il que l’intrigue soit à la hauteur. Là aussi, le scénariste frappe un grand coup. Pour ce troisième opus, il conserve les astuces des récits emboîtés : une jeune femme aux cheveux très courts, qu’on soupçonne être Roxanne, raconte l’aventure de ces six renégats à Monsieur Hettinger, notaire de son État. Mais ce n’est pas suffisant et elle lui raconte également ici la légende du conquistador Gabaldon et tout ce qu’elle va avoir comme influence sur les héros. Elle agit ainsi comme une voix off, un narrateur mystérieusement omniscient mais dont on sait bien que, si elle sait tout, elle ne dit que ce qu’elle veut, que ce qui l’arrange. Par chance, son interlocuteur est littéralement captivé et les interruptions sont peu fréquentes et toujours judicieuses. Surtout, elle a un talent incomparable pour l’envoûter, et le lecteur par la même occasion. Cela donne un récit au rythme saccadé et fort agréable où chaque rebondissement est savamment pensé, orchestré et introduit. Le lecteur n’est jamais perdu ; même s’il vaut mieux relire les albums précédents. Il n’est jamais en mesure de poser l’album, si ce n’est à la fin ! Pire, la péripétie finale rebat totalement les cartes et nous plonge dans un suspense assez incroyable. En ce qui concerne le dessin de Javier Casado, c’est tout aussi incroyable. Les personnages sont criants de réalisme. Dire qu’ils sont charismatiques pourrait passer pour un euphémisme ! Pour autant, il se dégage beaucoup de charme tous ces personnages, et on finit par aimer détester les pires brutes de l’Ouest. Un doute reste pourtant omniprésent sur la personnalité de certains personnages : si c’est déstabilisant, c’est totalement en lien avec l’intrigue. Grâce à une colorisation judicieuse, l’emboîtement des récits est très clair, tout en se faisant très vite oublié. C’est l’apanage des grands récits. Les décors apportent tantôt une touche de fraîcheur et d’autres fois, un concentré de violence autant qu’un espoir face à l’horreur de l’Humanité.
Oh que le temps va sembler long en attendant la conclusion de ce western à haute intensité ! On se consolera en relisant les trois premiers albums tout bonnement exceptionnels.
