Nom de la série : Volodymyr Zelensky
Titre du Tome: Au nom de l'Ukraine
Scénario : Elettra Stamboulis
Dessin : Gianluca Costantini
Couleur : Chiara Raimondi
Maison d'édition : Delcourt Encrages
Avec Volodomyr Zelensky, au Nom de l’Ukraine, Elettra Stamboulis et Gianluca Costantini signent un roman graphique dense, consacré à l’ascension fulgurante, et souvent méconnue, de l’homme devenu, malgré lui, la figure la plus scrutée de l’Europe contemporaine. Une BD intéressante sur un homme dont le parcours l’est tout autant !
Tout commence par l’enfance de Zelensky en Ukraine après son retour de Mongolie où ses parents travaillaient. On y découvre un jeune homme sérieux, mature et déterminé.
On le suit ensuite de son enfance en Ukraine soviétique aux plateaux de télévision, de la série Serviteur du peuple aux couloirs feutrés de la Présidence, jusqu’aux heures sombres de l’invasion russe... Au gré des six chapitres, l’album déroule un récit qui embrasse à la fois la trajectoire personnelle d’un homme ordinaire et les secousses géopolitiques d’un pays en perpétuelle recomposition. Sans l’héroïser, le livre montre comment un comédien populaire, doué pour tourner le réel en dérision, s’est mué en chef d’État résilient, symbole paradoxal d’une nation menacée mais déterminée.
Le mérite du scénario d’Elettra Stamboulis est d’entrelacer les différents fils de la vie de Zelensky sans perdre de vue le contexte, pourtant complexe, dans lequel elle s’inscrit. L’autrice ne se contente pas d’énumérer les étapes biographiques : elle cherche à montrer comment la personnalité de Zelensky s’est construite, dans un pays fracturé entre héritages soviétiques, tensions linguistiques et aspirations démocratiques.
Cette narration, n’hésite pas à prendre du recul pour retracer les influences politiques, culturelles et sociales qui façonnent l’Ukraine contemporaine. On découvre ainsi un Zelensky profondément attaché à son identité ukrainienne, même lorsqu’il grandit loin de chez lui, un adolescent curieux et espiègle puis un jeune acteur dont le talent pour la satire politique le prépare presque pour son futur sans qu’il le sache...
Le scénario évoque naturellement la série Serviteur du peuple, dans laquelle fiction et réalité se frôlent jusqu’à se confondre. Il évoque également ses liens forts avec ses amis du collectif Kvartal 95.
Mais l’autrice n’esquive pas non plus les zones grises : les accusations, les contradictions, les maladresses... L’album ne glorifie pas : il montre un homme qui doute, un dirigeant conscient du poids de chaque mot, de chaque demande d’aide adressée à un allié réticent (comme cette célèbre scène à la Maison Blanche en début d’année).
Petit bémol pour moi cependant, la densité de l’album peut parfois dérouter, surtout si l’on connaît mal l’histoire ukrainienne mais cela reste une bonne porte d’entrée pour découvrir ce personnage emblématique !
Au dessin, le trait précis de Gianluca Costantini apporte une dimension presque documentaire au récit. Son style restitue la tension permanente qui traverse la vie de Zelensky. Les scènes intimistes, comme les moments familiaux ou les souvenirs d’enfance, contrastent avec la puissance brute des planches consacrées à la guerre : rues dévastées, silhouettes inquiètes dans l’attente d’une frappe ou l'évocation du massacre de Boutcha...
Dense et parfois déroutant mais toujours intéressant, Volodomyr Zelensky, au nom de l’Ukraine est un roman graphique qui dépasse la biographie pour devenir le récit d’un homme ordinaire devenu symbole malgré lui.
