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La bande du 9 : La communaut du 9ème art

Bandeau de l'article L'homme qui en a trop vu

L'homme qui en a trop vu

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L’homme qui en a trop vu
 
Récit de Simon ROCHEPEAU et Ali ARKADY
Dessin et couleurs : Isaac WENS
Éditions : Futuropolis

 
Un témoignage extrêmement explosif et bouleversant d’un photojournaliste irakien lors de la bataille de Mossoul. Une illustration sans concession de ce que l’Homme peut faire de pire !
 

En octobre 2016, le magazine allemand Der Spiegel commande à Ali Arkady un reportage sur l’armée irakienne engagée à Mossoul dans la bataille contre Daesh. Kurde irakien, Ali a déjà couvert la bataille de Falloujah. Il réactive donc ses contacts. Mais une fois son reportage terminé, il prétend vouloir poursuivre son travail et préparer un film sur les hommes de l’ERD (Emergency Responce Division) du capitaine Omar. Il va donc suivre cette unité d’élite du ministère de l’Intérieur irakien. Durant 2 mois, Ali Arkady va vivre aux côtés de ces hommes marqués par plusieurs décennies de guerre et par les atrocités commises par le groupe État Islamique. Durant 2 mois, il va partager leur quotidien, leur repas, leurs conversations et leurs opérations. Petit à petit, ceux qu’il prenait pour des héros et des libérateurs vont se transformer en monstre assoiffé de vengeance et de pouvoir. Des monstres qui vont s’exhiber devant l’objectif du photographe quand lui ne pensera que « preuve » et « crime de guerre ». Mais peu à peu, la méfiance s’installe et la vie d’Ali ne tient bientôt plus qu’à un fil...
 
Quand on évoque la bande dessinée, indubitablement, les gens pensent Titeuf pour les plus jeunes, Tintin ou Spirou, s’ils sont plus âgés. A ce médium reste collé un héritage de légèreté. C’est oublier bien vite que le 9e art est un moyen de faire passer des messages durs et de mettre en perspective la violence du monde. Il n’y a qu’à voir les succès de Guy Delisle ou Fabien Toulmé pour s’en rendre compte. Avec ce L’homme qui en a trop vu, on passe à un niveau inédit, même pour les éditions Futuropolis, spécialisées dans la BD « sérieuse ». Pour bien comprendre, il faut lire attentivement la préface de Simon Rochepeau. On y découvre la genèse de cet album, la rencontre entre le scénariste de L’homme au bras de mer et le photojournaliste irakien, récompensé du prix Bayeux Calvados Normandie. On devine les difficultés que les deux hommes ont rencontré pour accoucher de cette biographie. On comprend la souffrance qu’a subie Ali Arkady dès la première photo et on se dit que cette lecture va laisser des traces. Pourtant, les premières pages se déroulent sans encombre : on arrive en même temps que le photographe sur le front, au sud de Mossoul. Notre premier contact avec la guerre s’effectue avec d’autres journalistes et rapidement, on se sent privilégié. On découvre Omar et Haïder, deux anciens contacts d’Ali. On plonge au milieu de ces soldats, de ces ombres au milieu d’un conflit d’une extrême violence mais où les coalisés se présentent comme des libérateurs et les sauveurs par rapport à l’EI. Mais là où la plupart des journalistes ont assez pour faire leur reportage, Ali a l’impression qu’on lui cache quelque chose. Il s’obstine, il reste sur place auprès des troupes de l’ERD. Tout doucement, il se fond dans le paysage. Tout doucement, il devient l’un d’entre eux et les paroles se délient, les gestes se font plus violents, les interrogatoires virent à la torture. Ali n’a plus le choix : pour sauver sa vie, il doit compromettre son éthique de journaliste. Pour témoigner, il doit engranger un maximum de preuves. C’est alors que le scénariste insère un prolepse bienvenu. On se retrouve au Quai d’Orsay en janvier 2017, en pleine cellule de crise qui doit décider du sort d’Ali Arkadi et de sa famille. C’est une partie intéressante qui permet aux lecteurs de comprendre que rien n’est jamais terminé et que la diplomatie a encore un rôle à jouer. Mais ce que je trouve le plus juste, c’est la présentation des bourreaux. Ali Arkady et l’album ne leur trouve aucune excuse mais un certain nombre de justifications. Sous certains aspects, c’est un retour à la loi du talion qui s’est joué au Moyen-Orient dans cette lutte contre Daech. Ce qui est parfaitement mis en avant, c’est l’inhumanité, non pas celle du groupe État islamique qu’on connaît tous mais celle des libérateurs. Alors comment affirmer par la suite que nous valons mieux que les terroristes ? Ce débat, loin d’être clôt prend ici une tournure décisive. Côté dessin, ce n’est pas beaucoup plus joyeux. Le trait très nerveux d’Isaac Wens met l’accent sur les personnages, sur leur ressenti, sur leur expression à travers leur regard ou leur sourire. A travers les décors volontairement flous et imprécis, la guerre s’estompe au profit de ces combattants et leur part d'ombre prend toujours plus de place grâce à une colorisation extrêmement sombre.
 
Attention, cet album est une véritable bombe ! À travers les 150 pages qu’il compte, le lecteur va découvrir le témoignage bouleversant d’un photojournaliste irakien revenu du théâtre d’opérations. Un témoignage sans concession sur ce que les hommes ont de plus violent.


Cédric
Chroniqueur
La Bande Du 9


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