La bande du 9 : La communaut du 9ème art

Monsieur Jules ou l'histoire d'un proxénétisme d'une autre époque confronté à la réalité contemporaine de la traite des femmes ; une bande dessinée qui oscille entre chronique sociale et comédie de caractères.

Monsieur Jules est un proxénète bien éloigné de Madame Claude : il vit sous le même toit que ses deux prostituées Mme Brigitte et Mlle Solange qui œuvrent à domicile. Cette communauté originale vit chichement puisque les deux dames n'hésitent pas à faire crédit à leurs clients, ou à se faire payer en fruits et légumes en échange de leurs faveurs. Il y a dans cette cohabitation du respect, de l'amour, mais aussi de la souffrance. Monsieur Jules a un côté paternaliste et bourru tout en ne semblant pas complètement serein avec son statut de « rentier pour dames ». Ainsi, tout bascule lorsqu'il recueille Tina, une prostituée laissé pour morte...

Le sujet bien que centré sur la prostitution est beaucoup plus large qu'il n'y paraît. Aurélien DUCOUDRAY opte ici pour une plongée dans un univers interlope plein d'humanisme qui nous permet de retrouver un thème qui pourrait être journalistique. À cet égard, un lecteur acteur est attendu pour saisir les allusions ou souvenirs qui y sont distillés. D'ailleurs, le dessin réaliste hachuré d'Arno MONIN fait alterner – entre autres – des planches oniriques ou d'autres sans dialogue propres à nous faire suivre les pensées et actions de M. Jules.

Si le cadre est celui des années 90, l'actualité de la dénonciation de la traite des femmes est toujours présente. Malgré la nature de l'intrigue, la vulgarité n'y est pas de mise, et on retient de cette bande dessinée son humour et son humanité comme lorsque deux enfants proposent à Mlle Solange leur poireau en espérant avoir ses doux services ! Le public concerné sera toutefois adolescent et adulte pour cerner les subtilités de cette chronique douce amère.