La bande du 9 : La communaut du 9ème art

Gloire et déchéance d'un idéaliste qui troqua son rêve d'étoiles pour vendre des armes.
Philippe Girard nous présente une biographie sans concession d’un homme avec toutes ses qualités et sa part d’ombre.
 
1934,orphelin pour la seconde fois en moins de 3 ans, Gerry est confié à la garde et aux bons soins de son oncle Philippe et de sa tante Edith. C'est elle qui initie le garçon à la lecture des romans de Jules Verne. Parmi eux, c’est De la Terre à la Lune qui le marque le plus. Ce sont surtout les canons qui l’impressionnent. Il se met alors en tête de mettre au point un canon qui expédierait le courrier d'un bout à l'autre du pays. Brillant, précoce et mature, Gerry intègre un prestigieux collège jésuite, grâce à la généreuse contribution de son oncle. Toute sa scolarité, brillante s'il en est, sera marquée par le mépris de ses paires quant à Jules Verne et de ses professeurs quant à son âge. Diplômé, il veut poursuivre son rêve d'enfant mais comme il faut bien remplir le frigidaire, et protéger son pays des Soviétiques, il est embauché comme ingénieur pour la défense nationale canadienne. Approché par la CIA, il fulmine lorsque c'est une fusée qui lance le premier satellite artificiel. Pour voir se concrétiser son rêve, il comprend qu'il va avoir besoin d’encore plus d'argent. Nombreux sont les hommes, pas forcément très recommandables, intéressés par ses canons ! Et tant pis si Gerry doit y perdre une partie de son âme...
 
Depuis Jackie Brown et plus encore Lord of War, les cinéphiles sont habitués aux vendeurs d'armes. Inspiré d'un célèbre vendeur de mort Viktor Bout, le film d'Andrew Niccol met surtout en avant le cynisme du personnage, joué par Nicolas Cage : « Ce n'est pas notre guerre ! ». Super canon ! , lui, rend hommage un idéaliste qui s'est laissé embarquer dans le trafic d'armes. D'ailleurs, l'ouvrage se termine par une brève, mais très intéressante, biographie de Gérald Vincent Bull, le véritable docteur Gerry. Librement inspiré de la vie de l'ingénieur canadien, Super canon ! est une biographie au rythme relativement soutenue qui remonte aux origines du rêve d'un génie de la alistique. Par conséquent, les débuts sont marqués par de nombreuses ellipses. Chaque changement d'époque étant daté et marqué par une évolution physique du héros, la lecture de l'enfance et de l'adolescence se fait sans heurt. Devenu adulte, son caractère s'affirme par une série d'anecdotes bien senties. Pour le reste, le récit se fait de manière chronologique, marqué par la guerre froide et conflits périphériques. Seule exception, l'ouverture s'effectue en 1990, à l'approche du dénouement mais cela est vite oublié par le déroulé assez trépidant de la vie de cet être d'exception. Le récit est également rythmé par l'apparition du mentor de Gerry, Jules Verne, venant de lui rappeler l'importance de ses rêves. Cela est extrêmement positif car il renforce l'humanité du héros. Scénariste, Philippe Girard assure également la mise en image. Il fait le choix d'une ligne claire qui sied bien aux personnages ainsi qu'à l'époque. Les planches sont globalement construites en gaufrier assez classiques, quelques-unes se démarquent afin de mettre en avant les moments clefs de la vie de Gerry. C’est ici, la naissance de son premier enfant ou la mise au point de son premier missile. Bien évidemment, toute relation entre les deux n'étant absolument pas fortuite. La colorisation fait la part belle aux teintes de camouflage militaire mais elle peut aussi créer des bulles de roses propres aux rêves et à l'espoir, souvent déçu.
 
Dans notre monde fait d'influenceurs et de superficialité, Super canon ! détone car il rend hommage à un personnage méconnu mais qui a profondément transformé la balistique et donc nos vies. Une sorte de super-héros avec des super pouvoirs et sa part d’ombre !

x J'aime