La bande du 9 : La communaut du 9ème art

Ziad et Louna sont frère et sœur. Unis par la famille, ils mènent pourtant leur vie chacun de son côté. Le foot et la couture pour Ziad, la liberté et la boxe pour Louna. Mais lorsque des super-héros entrent dans le restaurant familiale, leur vie pourrait bien se trouver changée à jamais.
Avec deux albums concomitants, le lancement de cette nouvelle série jeunesse ne passe pas inaperçue. Et c’est tant mieux car, outre l’originalité, l’intrigue, la construction et le dessin font mouche !
 
Ziad est un garçon quelconque. Un peu enrobé, il est cantonné au banc de touche par son entraîneur de foot. Il faut dire que la dernière fois qu'il est entré sur le terrain, il a dribblé comme un fou avant de marquer un somptueux but … contre son camp. Pour ses parents, gérants d’un kebab, la coupe est pleine ! Mais quand un super-héros entre dans le restaurant pour déguster un super repas, Ziad a une révélation ! Il sera Super héros ! Seulement, quand on n’a pas la chance de posséder une supernugget, reste les gadgets. Malheureusement, cela coûte cher et Ziad n'a pas un rond. De son côté, Louna, sa sœur, rêve de liberté et d'action. Lorsqu'elle découvre une petite annonce pour un groupe de super-héros boxeurs, elle fonce tête baissée. Aucun des deux n'imaginait que leur vie allait prendre un super tournant…
 
1938, la Terre est menacée par une gigantesque météorite qui, par miracle, ne fait que frôler la planète bleue, explosant dans l'atmosphère en plusieurs milliers de petits cailloux. Ces pépites donnent un super pouvoir au premier être qui la touche. Presque 100 ans plus tard, le monde ne fonctionne plus que sur les applis, les réseaux sociaux et Uber. Un problème : commandez votre super-héros ! Mais attention, privilégiez ceux qui ont 93 ou 95 % d’opinion positive. Et pas les loosers à 85 %. Une fois le cadre posé, reste à Olivier Bocquet à nous présenter les héros. Et là, cela devient super intéressant ; tant sur la forme que sur le fond. Comme on a affaire à une nouvelle série jeunesse chez Dupuis, il est logique que ce soit des enfants ! Peu importe qu'ils appartiennent à la même fratrie, l'originalité réside plutôt dans le fait que ce lancement s'effectue avec deux albums en miroir et qu'on puisse commencer par n'importe lequel des deux. Peut-être est-ce par « solidarité masculine » mais j'ai préféré débuter l'album par Ziad, le petit frère rondouillard. Il s'agit d'un gamin quelconque qui ne rêve que d'une chose : devenir footballeur professionnel ! Malheureusement, son entraîneur le cantonne sur le banc de touche, ne l'utilisant qu'en tout dernier recours. Et grand bien lui fait car, lorsque Ziad entre enfin en jeu, et après un magnifique mouvement, il marque ... contre son camp. Dans le plus grand secret, il change alors d'orientation. Il sera super-héros ! Mais là encore ses débuts sont super foireux. Il se fait embobiner par un vendeur qui lui vend des pilules d'invisibilité et se retrouve, à poil, dans le restaurant familiale en train de piquer la carte bleue paternelle. Des parents, parlons-en justement. Immigrés modestes mais bien intégrés, ils oscillent entre tradition et développement personnel de leurs enfants. C'est ainsi que lorsque Louna dit vouloir se mettre à la boxe, les parents s'étranglent avant enfin d'accepter. Après une déconvenue sur le ring, elle aperçoit une affiche : des super-héros recherchent des boxeurs. Super héroïne ! C'est le rêve de Louna. Elle va rapidement déchanter car le club ne se compose que d'une seule autre fille, sans aucun pouvoir. Au final, ces deux-là se sont bien trouvées et forment un duo plutôt efficace qui se retrouve au Golden Power. On l’aura donc compris, ces deux albums fonctionnent en complément puisqu’on croise la vie de Louna et de Ziad. Cela reste des albums d'ouverture et le scénariste prend son temps pour poser les jalons de son intrigue. Il essaime par ici un portail multidimensionnel, par là un super vilain en forme d’œil gigantesque. Mais ce sont bien les véritables gens qui sont au centre de l'album, les gens et la société hyper connectée, ultra instagrammable et super uberisée. Cela montrera aux jeunes tous les travers de notre société, en espérant que cela les fasse réfléchir. C'est le toscan Fabio Lai qui signent les dessins. Celui qui s'est fait connaître grâce à la série Nombrils, également chez Dupuis, confirme tout le bien qu'on pensait de lui. Le trait est vif et expressif, les actions sont percutantes, les univers parallèles sont bourrés d'imagination, à l'inverse des décors réalistes de nos super-héros du quotidien. Cela donne deux albums super agréables à lire, sans temps mort et avec une grande variété de cadrage et de mise en page. La colorisation, signée Fabien Alquier, s'effectue dans des teintes mates qui correspond parfaitement à l'ambiance Marvel. Seule petit ombre au tableau, on aurait pu espérer une différenciation entre Ziad et Louna. Cela aurait apporté du rythme et aurait  pu être drôle lors des croisements. Mais ce choix revient aux artistes qui proposent une œuvre très aboutie.
 
Au final, le lancement de cette nouvelle série Le métier le plus dangereux du monde, chez Dupuis est une réussite. Avec deux albums concomitants basés sur deux apprentis héros dans un futur proche et très ressemblant à notre présent, les jeunes lecteurs (et les moins jeunes) auront double plaisir ; en attendant le prochain album prévu pour début 2024.

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