La bande du 9 : La communaut du 9ème art

Scénario : Christian Perrissin d’après l’œuvre de Winston Smith
Dessin : Guillaume Martinez
Couleurs : Isabelle Merlet et Jean Jacques Rouger
Editions : Futuropolis
 

L’histoire d’un aventurier du XXe siècle, tout aussi incroyable que celle de son autobiographie posthume. Après l’évocation d’une Angleterre traditionnaliste, Winston Smith découvre l’extrême Orient et ses soubresauts contre la domination européenne.
Cette biographie confirme tout le bien qu’on pensait d’elle et constitue toujours un grand moment d’histoire  et de littérature!
 
Seul. Le jeune Winston Dover Smith l’est plus que jamais en ce mois de janvier 1922. Diplômé d’Eton mais sans le moindre refuge. Orphelin, son protecteur Adam Wilkinson, ne veut plus entendre parler de lui, le tenant pour responsable de la disparition de sa fille Edna. Il se tourne alors vers le comte Ashwood, qu’il  pense être son grand père. Le vieil homme lui envoie une lettre de recommandation auprès de la British American Tobacco. Avec ce précieux sésame, Smith est rapidement engagé et, à sa majorité, il accepte un poste à Shanghai. Il partage alors son temps entre son travail et les plaisirs qu’offre la concession. Il fréquente les « perles de Shanghai », ces filles mi escorts mi prostitués l’aident à chasser ses insomnies. Car si Winston est seul, il n’arrive pas à oublier Julia Wilkinson et sa culpabilité. Il retrouve cependant avec plaisir son ancien professeur d’Eton. Aldous Huxley fait en effet une halte en Chine pendant son tour du monde. Il rappelle à son ancien étudiant les vertus de l’esprit et sa suprématie sur les plaisirs voluptueux. Fort de ces recommandations, Winston accepte une mission dans la province reculée du Hunan. Durant le trajet, le jeune diplomate constate que la situation est de plus en plus explosive. Il faut dire qu’à peine arrivé, il est directement jeté au cachot et ne doit la vie sauve qu’à sa pratique de la langue de Lao Tseu. Profitant d’une conjoncture particulière, il décide de quitter la Chine et rend visite à Blair, un ancien condisciple d’Eton, en Birmanie. Celui qui signera ses textes du pseudo de George Orwell fait carrière dans l’armée des Indes. Néanmoins l’esprit de Smith n’est désormais plus captivé que par une missive du comte Ashwood lui annonçant le décès de Wilkinson, et par Julia…
 
Qui se souvient de Winston Smith ? L’écrivain, quelque peu oublié aujourd’hui a traversé le XXe siècle à coté des plus grands, d’Aldous Huxley à George Orwell. Mort en 1984,  c’est son autobiographie, inachevée, que Christian Perrissin (El Nino, ou plus récemment Geisha, le jeu du shamisen) adapte  en Bande Dessinée. Ce tome 3 s’intéresse à un épisode court, 14 mois, mais marquant pour le futur romancier : son expérience chinoise. Le jeune homme continue à se construire, allant de rencontres en rencontres, sans jamais oublier la femme qu’il aime : Julia. Il observe les soubresauts de la Chine, analyse le fonctionnement de l’Empire Britannique. Bref, il nous livre un portrait du monde au milieu des années folles. On en oublierait presque Anna Laurens mais c’était sans compter sur les rebondissements de fin d’album ! Côté dessin, on retrouve le style réaliste de Guillaume Martinez comme une madeleine de Proust. Dès les premières pages, les automatismes de lecture, les personnages, les ambiances reviennent. Le dessinateur quitte l’intérieur feutré des écoles privées anglaises pour les grands espaces asiatiques. Le changement est une réussite tant le dépaysement prend le lecteur aux tripes.

Non, décidément, cette adaptation de l’autobiographie de Winston Smith figure bien parmi les toutes meilleures biographies de la Bande Dessinée.

x J'aime